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    [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

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    Etudes [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Dofbi 2007-04-30, 03:53

    Rappel du premier message :

    LEUK DAWOUR MBAYE



    Existe-t-il un Sénégalais, Dakarois de surcroît, qui n'ait jamais entendu parler de Leuk Dawour Mbaye ?

    Leuk Dawour est le rab de Dakar, de même que Ndoumbé Diop est le rab de Diourbel, Mame Coumba Lamba, celui de Rufisque, Mbossé, celui de Kaolack…

    Il est bien connu qu'une ville n'appartient pas aux humains qui s'y activent dans la journée, mais à un rab qui l'inspecte la nuit. Gare à celui qui se trouve sur son chemin. On dit que Ndoumbé Diop apparaît sous forme de poule accompagnée de ses poussins. Voir cette poule après minuit, signifie mort immédiate ou folie incurable. Mbossé, lui, prend la forme d'un varan. Il y en a un dont on dit qu'il attend que tu sois au milieu d'une rue ; il se transforme alors en deux barriques tonitruantes qui surgissent des deux extrémités de l’artère, tournent à grande vitesse et viennent t'écrabouiller. Demandez aux aïeuls, ils vous raconteront plein d'histoires de ce genre. Ceux à qui il arrive de rester dans les rues jusqu'à des heures indues, risquent de mauvaises rencontres. On les retrouve, le lendemain, secs et inertes comme des bouts de bois ou, dans le meilleur des cas, marchant avec la bouche derrière la tête. Naturellement, je ne pouvais pas gober de telles sornettes. Pourtant...

    Laissez-moi reprendre mon souffle avant de continuer…

    Tout a commencé la veille de la « disparition » de Bakary, mon époux. C'est ma mère qui utilise ce mot, disparition. Quant aux autres, ils n'arrêtent pas de me dire qu'il est mort, ce que je n'arrive pas à croire. Bakary ne peut pas m'abandonner comme ça… Sans même dire adieu... Non, je ne pleurniche pas. Il n’y a pas de raison. Je ne suis pas inquiète non plus, je sais qu'il va revenir. Il est juste allé visiter de la famille à Mbour. Sa voiture est sans doute tombée en panne...

    Nous nous étions rencontrés, je m’en souviendrai toujours, lors d'une soirée sénégalaise à la Cité Universitaire, à Paris. Le courant passait à merveille. Le coup de foudre, comme on dit. Depuis, nous ne nous sommes jamais quittés. Nous nous sommes mariés en France, car mon père ne pouvait accepter pour gendre quelqu'un d'une autre caste et surtout d’une basse classe sociale. Moi, j'avais trouvé l'homme de ma vie et, pour rien au monde, je n'allais le lâcher.

    Bakary était musicien, un talentueux percussionniste. En fait, il jouait de tout. Doué en tout, il composait souvent de jolies ballades pour moi, moi toute seule. Cependant, ce qui me liait le plus à lui, c'était, sans parler de l'amour et du respect qu'il manifestait à mon égard, sa grande sensibilité qui faisait sa faiblesse et sa force en même temps. Il était égal à lui-même en toutes circonstances. Tout comme moi, il rejetait quasiment toutes conventions sociales et menait sa vie tel que bon lui semblait. Mais, contrairement à moi, il venait, comme je l'ai dit tout à l'heure, d'un milieu très modeste, de parents pauvres, pour ainsi dire.

    Moi, vous vous en doutez, je suis, disons-le, du Sénégal d'en haut. Je ne m'en vante pas, mais je n'en ai pas honte non plus. Il faut bien naître quelque part, non ? Mon père est connu de tous les hommes d'affaires du pays et ma mère a de grandes responsabilités dans l'administration. Je suis la cadette de mes quatre frères. La seule fille de la famille. Que les indigents se réconfortent en écoutant mon histoire ! Les princesses, souvent, envient les Cendrillon. J’ai été élevée dans un luxe où je me sentais comme en prison.

    On m'imposait les bonnes manières car, dans ce milieu, l'image qu'on donne de soi est au-dessus de tout. J'ai été gavée de bonnes manières, gavée jusqu'à en vomir. Pouah ! Les bonnes manières ! « Habille-toi comme ci... Marche comme ça... Parle ainsi... Ne regarde pas là... Qu'as-tu fait à telle heure ? … Qui est ce garçon qui a téléphoné ? … Tu ne sortiras pas cette semaine... Faut qu'on t'accompagne... Fais attention aux voyous... Y’a invitation... Y’a réception... » Holà ! Holà ! Ce mode de vie me dégoûtait. Pourtant, je devais jouer le jeu, faire semblant... C'était l'unique manière de gagner la confiance de mes parents et les convaincre de m'envoyer poursuivre mes études à Paris.

    Je m'efforçais même d'être souriante et aimable avec Matar, ce fils de ministre qu'ils m'avaient présenté et invitaient à la moindre occasion.

    - Comme il est charmant, ce garçon ! s'exclamait maman.

    - C'est une tête ! Le pays a besoin de jeunes comme lui, renchérissait papa.

    Au diable, le pays ! Au diable, la tête de Matar ! (Le pauvre ! Il n'y comprenait rien. Dès que je me retrouvais seule avec lui, nos parents voulant laisser germer une certaine intimité, je l'envoyais valdinguer.)

    J'étais enfin à Paname ! Maman qui avait effectué le voyage avec moi, resta presque deux mois dans mon appartement, histoire de s'assurer que tout allait bien. Elle préparait mes repas, mettait mon linge dans la machine à laver et faisait mon lit. Il est vrai qu'à l'époque, je n'étais même pas capable de faire un café ou un œuf sur le plat. On faisait tout pour moi. Les riches ne laissent pas leurs enfants sans garde-fous. On m’éloignait du feu et de tout danger. Même quand j'allais à la maternelle qui était juste en face de chez nous, il fallait toujours quelqu'un pour me faire traverser la route. Que voulez-vous ? On ne choisit pas ses parents. Maman qui interceptait mon courrier, me remettait les lettres que Matar m'envoyait, presque tous les jours. De très maladroites déclarations d'amour, de quoi remplir mes sacs-poubelles. Je continuai quand même à jouer le jeu jusqu'au départ de ma génitrice qui me fit souffler, ô combien !




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    Dernière édition par le 2007-04-30, 21:50, édité 2 fois

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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-05-08, 11:54

    xana kay ça ne peut pa être vrai hum hum quelle histoire. On dirait que c'est une mise en garde qui veut dire "Faitres attention au coup de foudre" héhé Sinon ce qui est arrivé à Chantal est vraiment triste.
    Bravo Man Dofbi une autre Ben Voilà
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Tyf 2007-05-10, 02:17

    Génial, j'en veux d'autres. Je ne suis pas rassasiée. Ils sont trop bien ces récits fantastiques. Merci encore de nous régaler...
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-05-10, 06:04

    Les filles, vous allez rángati mon Dof.
    Il me semble cependant qu'il y a un thread pour les commentaires, mais ce n'est pas grave.
    Je vous remercie de sa part.
    Avez-vous lu sur mon blog, les récits de mes exploits, comment j'ai affronté le taureau, le boa et la lionne ?
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Tyf 2007-05-10, 06:16

    Non pas encore man nit ki
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-05-10, 06:21

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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Kayla 2007-05-24, 07:23

    Ok, je reclame une nouvelle. Ca me manque de vous lire!
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Maï 2007-05-24, 15:06

    Bravo

    Je n'ai lu que la première nouvelle pour l'instant, elle m'a beaucoup plu.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par maman gaye 2007-05-25, 09:03

    modou dialane est 1 charlantan mai la maman est une inconciante.
    c vraimen bien ton histoire si les mamans lisaient cet histoire sa leur apendra

    merci encore pour listoir ell est fantastik
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-05-30, 02:03

    MAAM MAREME

    Maam Marème n'avait pas d'enfant, mais certains l'appelaient « grand-mère » parce qu'elle avait l'âge de l’être, d’autres parce qu'elle avait élevé de nombreux enfants qui, eux-mêmes, étaient devenus parents à leur tour. Maam Marème était une femme stérile. Malgré ses ferventes prières et celles de tous ceux qui l'aimaient, elle n'avait jamais connu les douleurs de l'accouchement. En souffrait-elle ? Elle n'en parlait à personne et nul ne lui posait de questions à ce sujet. Elle avait entendu parler de Sara, l’épouse du prophète Abraham, qui devint mère à l’âge de quatre-vingt-dix ans, mais elle se disait que toutes les femmes ne sont pas des Sara ni tous les hommes, des Abraham. Elle s'était résignée à sa stérilité, l'avait acceptée et en avait fait une fierté. Elle prenait cela comme une épreuve qu’elle avait brillamment surmontée. Pensant à tous ceux qu'elle avait élevés, il lui arrivait de s'écrier : « Mon Dieu, je Te remercie de tout mon cœur ! Je n'ai jamais accouché, mais, par Ta grâce, je me suis toujours sentie comme une jeune maman. Je suis la mère de tous, la grand-mère de tous. »
    Dans sa jeunesse, elle était une fille à la beauté réputée, et dont la courtoisie et la gentillesse étaient légendaires. On ne tarissait pas de compliments à l’égard de son père, Diery Fall, qui l'avait si bien éduquée. Diery, disciple d'un grand marabout, était un homme pieux. Il connaissait tous les descendants de son maître - qu’il appelait son « espoir » - et leur vouait une vénération distinguée. Il choisit pour gendre son cousin Meïssa Diodio, connu pour sa soumission à Dieu et sa fidélité aux marabouts. La jeune Marème ne s'opposa pas au choix de son père ou, si elle le fit dans son cœur, elle ne le montra pas. C’était une fille réservée. Jamais on ne la vit se disputer ou se bagarrer avec quelqu'un. Fuyant les commérages, elle ne se mêlait pas de ce qui ne la regardait pas. On disait d’elle qu'elle était une sainte. Une maman réprimandant ou conseillant sa fille, ne manquait jamais de lui dire : « Regarde donc Marème Fall, la fille de Diery Fall ! » Marème n'était attirée ni par les rivalités des jeunes filles ni par leurs rêves de belles parures et de prestige. Elle était même gênée quand on faisait allusion à sa beauté. Elle aimait prier, jeûner, obéir à ses parents, être aimable avec tout le monde. Elle avait reçu de sa mère un nombre considérable de bijoux en or et d'autres joyaux qu’elle n’avait portés que le jour de son maria¬ge, lorsqu’elle avait seize ans.
    Au bout de cinq années de ménage, elle commença à s'inquiéter de ne pas avoir d'enfant, car être mère était un grand désir qu’elle nourrissait depuis le jour où elle avait appris que l’on allait donner sa main à son « oncle » - c’est ainsi que les femmes appelaient leurs maris. Elle était encore très jeune, et continuait d’entretenir son rêve. Mais la rumeur disait qu’elle était une femme stérile. Des amies lui disaient que c’était peut-être son mari qui était malade. Elle leur répondait que cela revenait au même. Meïssa Diodio épousa une deuxième femme qui tomba enceinte au bout de quelques mois. Marème se dit alors, que si Dieu le voulait ainsi, elle le prendrait de bon cœur. Elle savait se contenter de ce que son Seigneur mettait à sa disposition. A trente ans, elle n’avait toujours pas d’enfant. Une de ses sœurs lui confia son bébé qu'elle venait de sevrer. Marème l'accueillit avec joie. La petite Absa Ndiaye grandit épanouie dans sa case, jusqu'au jour de son mariage, à l'âge de dix-sept ans.
    Marème fut une excellente mère pour tous les enfants que ses parents et amis lui confièrent par la suite, pour remplir sa solitude d’arbre sans fruits. Elle élevait les filles jusqu'à leurs fiançailles, les garçons jusqu'à ce qu’ils fussent circoncis. Elle reçut cependant plus de filles que de garçons. A tous, elle inculqua la politesse, les bonnes manières, le sens de la justice, le goût du travail. On l'appelait « Ndey Marème » ou « Yaay Marème », c'est-à-dire « Maman Marème ».
    Son mari, polygame, voyageait beaucoup, d’abord parce que ses femmes n'étaient pas dans la même ville, mais aussi parce qu'il ne pouvait pas rester longtemps sans aller visiter un marabout et, surtout, il ne voulait manquer à aucun rassemblement religieux. C'était un commerçant dont les affaires marchaient clopin-clopant. On racontait qu'il n’était qu’un fou qui donnait tous ses biens aux marabouts. Chaque fois que la rumeur lui parvenait, il répondait à ceux qui la lui rapportaient : « Tant que la foi n'est pas comparable à de la folie, c'est qu'elle n'est pas assez grande. » Puis, il ajoutait : « Rien ne vaut la demeure éternelle. » Pendant son absence, Ndey Marème s'occupait de la boutique. A son retour, elle ouvrait son petit restaurant à elle, que l'on appelait « passiong », sans doute par déformation du mot « pension ».
    Ce restaurant n'était qu'une vieille cabane, mais on s'y sentait comme dans un palais. On aimait la bonne humeur de Ndey Marème, sa générosité, la grande attention qu'elle accordait à tout le monde. On mangeait bien chez elle, on s'y reposait bien, on y rencontrait des gens aimables. On n'y entendait ni médisance ni plaisanterie de mauvais goût. On en ressortait comme d'un merveilleux rêve. On s'en allait en pensant : « Quelle femme extraordinaire ! » Les villageois qui venaient faire leurs courses en ville, appréciaient sa cuisine et s’arrêtaient volontiers dans sa gargote. Elle les recevait comme s'ils étaient des membres de sa famille, les servait comme s’ils étaient des seigneurs.
    Quand son mari voyageait, on regrettait son absence au restaurant, mais on passait la voir à la boutique qui ne débordait jamais de marchandises, juste pour la saluer ou pour prendre de ses nouvelles. « Dommage qu'il n'y ait pas grand-chose dans cette boutique ! » disait-on. Ndey Marème était un aimant pour la clientèle. Elle était honnête, digne de confiance et généreuse. Même si elle avait vendu des grains de sables, on les aurait sûrement achetés, rien que pour lui témoigner de la gratitude. Les paysans éprouvaient un énorme plaisir à lui offrir leurs premiers épis de mil, leurs premières graines d'arachide et d'autres denrées de saison.
    Chaque fois qu’elle sentait son époux dans le besoin, ce qui était fréquent, elle lui remettait de l'argent ou des bijoux, en lui disant : « Mon oncle, peut-être qu'avec ceci, tu pourras faire quelque chose pour la famille. » Elle le disait, non pas pour le rabaisser ou pour lui faire la morale, mais parce que pour elle, la famille, c'était aussi les autres femmes de Meïssa Diodio - il en avait quatre - qui n'avaient ni restaurants ni bijoux en or, des femmes qu'elle considérait comme des sœurs, même si elle ne les voyait que très peu souvent.
    Sa maison était constituée de deux cases, une pour son époux et une où elle dormait avec les enfants qu'on lui confiait. Il y avait deux grands lits dans sa case, des lits garnis de paillasses confectionnées par un de ses cousins. S’il lui arrivait d’avoir plusieurs enfants en même temps, les plus jeunes dormaient près d'elle, et les autres dans le lit en face. Elle leur apprenait les prières à dire avant de dormir et celles à dire au réveil. Elle n'allait rejoindre son mari que la nuit, lorsque tous les bambins sombraient dans un profond sommeil. Elle se levait de très bonne heure, préparait le petit-déjeuner et réveillait les enfants dans un ordre bien précis. Elle commençait, à l'aube, par les jeunes filles qui devaient l'aider à piler le mil, puis, vers l'aurore, par les jeunes garçons qui allaient se blottir en bâillant près du feu et, enfin, les tout-petits dont elle ne dérangeait le sommeil qu'après le lever du soleil. Aux plus grands, elle commandait la prière rituelle avant toute autre activité.
    Une vieille hutte servait de cuisine et, dans un coin de la cour, une palissade disposée en demi-cercle déterminait l'espace consacré aux ablutions quotidiennes. Au milieu de la cour, se dressait un manguier qui, contrairement à Ndey Marème, était, lui, très fertile. Quelle joie pour les enfants, ceux qu'on lui confiait et ceux des voisins, qui montaient cueillir les fruits dès qu'ils étaient à peine aussi gros que leurs poings, verts comme les feuilles de l'arbre et amers comme des citrons ! Ndey Marème leur disait, sans conviction, que les mangues vertes donnaient la colique. Elle-même en raffolait au temps où elle avait leur âge. De toutes façons, les enfants ne l'écoutaient pas. Et elle aimait les voir jouer aux singes sur le manguier. Elle fixait les règles : « Ne montez pas trop haut… Laissez mûrir les mangues que vous ne pouvez pas atteindre… Ne lancez pas de pierres… » Ils descendaient ramasser leur récolte qu’elle comptait gaiement avec eux. Elle donnait à chaque enfant sa part de mangues et leur conseillait d'y mettre un peu de sel pour en atténuer l'acidité et de se frotter les dents avec les noyaux pour les nettoyer. « Cela les rend plus blanches », disait-elle. Les mangues rescapées, une fois mûres, étaient cueillies par des adolescents du voisinage qu’elle prenait le soin d’appeler, puis elle les distribuait aux mômes dont certains l'appelaient déjà « Maam Marème » (Grand-mère Marème).
    Presque toutes les nuits, les enfants venaient auprès d'elle, et elle leur racontait des histoires. Elle était une excellente conteuse. Les gamins du quartier disai¬ent à leurs parents : « Nous allons écouter les contes de Maam Marème », et ils étaient libres de partir. Qui a grandi au quartier Paris, à Diourbel, dans ces années-là, et n'a pas été assidu aux contes de la « grand-mère de tous » ?
    Maam Marème avait le don de la parole. Quand elle parlait, il n'existait plus rien d'autre que sa voix, les images qu'elle évoquait, les sensations et sentiments qu'elle suscitait. On pouvait l'écouter, envoûté, des heures durant. On respirait au son de sa voix. On était hypnotisé par les silences qu'elle marquait. Les marmots s'installaient autour d'elle, à la belle étoile, certains assis, d'autres allongés sur des nattes, des pagnes, leur servant de couvertures, négligemment posés sur leurs épaules. Les plus jeunes se blottissaient contre elle.
    La joie régnait dans cette maison, mais les cases se détérioraient. Maam Marème voulait plus de chambres pour les enfants. Elle voulait une maison en briques de terre battue, aux murs recouverts de ciment et peints à la chaux ocre, avec des toits en zinc, comme on en voyait beaucoup à l'époque. Elle en parlait souvent à son mari, Meïssa Diodio, mais, lui, ne semblait pas enthousiasmé.
    Un beau jour, elle rassembla ses économies, vendit quelques bijoux, sollicita les conseils d’un maçon et acheta le matériel nécessaire. Tôt le matin, elle traça son plan directement sur le sol, prévoyant les espaces pour les lits, les canaris, les tables, les sièges… Elle retroussa son pagne jusqu'aux genoux, l'attacha solidement, prit une pioche et une pelle, et commença à creuser. Les parents et voisins qui passaient lui dire bonjour, ne pouvant s'empêcher de lui demander ce qu'elle faisait, furent surpris de l'entendre, pour la première fois, faire un écart de langage. « Ce ne sont pas les couilles qui construisent une maison », répon-dait-elle. En quelques heures, le quartier, sensibilisé, fut mobilisé. Tout le monde se transforma en manœuvre. Chacun, de tout son cœur, faisait de son mieux pour aider cette brave femme. Certains creusaient, d'autres évacuaient le sable ou fabriquaient des briques. Les enfants étaient fiers de se trouver dans cette grande agitation, de se sentir utiles et de recevoir des compliments.
    Lorsque Meïssa Diodio rentra de voyage, il fut ébahi de voir une belle maison toute neuve à la place de ses vieilles cases. D'un côté du manguier, il y avait un bloc de trois chambres et deux pantarés (petites pièces), de l'autre, une chambre pour lui. Une chambre à part, bien plus grande que les autres, qui correspondait à sa position de chef de la famille. Il remercia sa femme, la félicita longuement et pria pour elle.
    A Diourbel, dans certains endroits, on parle encore de Maam Marème, la femme qui avait retroussé son pagne pour bâtir sa maison. On en parle comme d’une reine à qui il n’avait manqué qu’une noblesse acquise de naissance. Il y a dans le bas peuple, des héros dont les exploits ne sont pas chantés par les griots, mais qui restent, à jamais, gravés dans les mémoires.

    A suivre...
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Dofbi 2007-05-30, 02:12

    scratch scratch scratch j'étais venu pour vous poster ce texte, mais je vois que...scratch scratch scratch mess mess mess


    A bientôt pour la suite alors Embarassed
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-05-30, 04:13

    Ta femme t'a devancé Ehey elle est trés belle cette histoire, elle est vraie ou pas?
    Une brave femme qui a tout le mérite d'une mère. Elle n'a peut être pas donner la vie mais elle a donné beaucoup d'amour.
    S'il y'a une suite on l'attend même si l'histoire est déjà parfaite ainsi.
    Merci
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Abssiss BABISTO 2007-05-30, 20:17

    Wow: feu : : feu : : feu : , je viens de finir ma lecture mais c'est magique ( ok c'est bon là qu'on arrête de me regarder Evil or Very Mad ; tout le monde sait maintenant que je suis devenu le plus grand paresseux du forum SadSad )!!!
    J'avais réellement voulu énumérer tous les évènements que j'ai réellement connus ou vécus mais en descendant dans les profondeurs, je n'ai pas pu tout regrouper, tellement je m'y retrouve sous plusieurs endroits Embarassed ! Que dirais-je même? Presque partout pale et ça m'a bien tapé ce coup de la nostalgie : souvenirs-souvenirs pale Crying or Very sad !

    C'est clair que je vais aimer car j'ai déjà aimé !
    On attend la suite car cette Maam Marème m'intéresse beaucoup Embarassed !

    Maam Marème, comme ça démarre là, représente bien deux personnes qui m'ont beaucoup marqué dans ma vie (une tante que j'ai connu sous l'appellation "Grand-Mère", et ma Grand-mère)
    Merci bien grand et on reste aux aguets pour la suite !!!

    La siwite, la siwite ! : feu : : feu : : feu :
    Man Nit ki si Man Dof bi n'est pas libre et que toi aussi de même je pense que vous pouvez donc donner la suite à votre gosse là : Dofbi pour qu'il insère de temps en temps Embarassed
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Sistersandrine 2007-05-31, 02:01

    Je viens de tomber par hazard sur ces histoires géniales!!
    Je n'ai eu le temps de lire seulement les 2 premières, mais je compte bien revenir très vite finir de lire les autres!!!

    Bravo [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi) - Page 2 Smilies6 C'est exactement mon genre de lecture préférée, merci Man Dofbi, je sens que je vais me régaler!! youpi.........youpi youpi.........youpi youpi.........youpi
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Dofbi 2007-05-31, 05:36

    Deuxième Partie

    Maam Marème devint « grand-mère » à quarante-sept ans. Absa Ndiaye, la première fille qu'elle avait élevée, venait d’accoucher d'un fils nommé Birima Diouf. Maam Marème, ravie, prit grand soin de la mère et du bébé. Elle allait les visiter régulièrement, les comblant d'attention et de cadeaux.
    Elle eut, par la suite, plusieurs « pe¬tits-enfants » avec qui elle se comporta de la même manière.
    Le temps s’écoulant à une vitesse inouïe, Birima Diouf atteignit ses vingt-cinq ans et il tomba amoureux de Dibor Sène, la bonne de ses parents. Dibor, de l'ethnie sérère, venait de Kouré, un petit village non loin de Diourbel. Elle n’était pas vraiment insensible au charme du jeune homme. Ils aimaient plaisanter ensemble, rire de tout et de rien, sauf devant Thiéyacine Diouf, le père de Birima, qui ne supportait pas ce genre de laisser-aller dans sa maison. Absa Ndiaye, par contre, avait droit à des scènes qui l’intriguaient, la laissaient perplexe. Elle surprenait journellement, sur le visage de son fils et sur celui de la bonne, l'œil de l'amour qui n'échappe pas à une femme. Elle les séparait alors, rappelant à chacun ses devoirs. Dibor avait de la vaisselle à faire ou de l'eau à aller chercher, et Birima devait réparer la clôture qui tombait ou faire quelque chose d'utile, comme un homme, au lieu d'être là, à bavarder avec les femmes. Mais l'amour, on le sait, relègue toute autre occupation au second plan. Les jeunes gens, irrésistiblement attirés l'un par l'autre, trouvaient toujours le moyen d'échanger quelques paroles ou quelques regards ou de se frôler avec beaucoup d'ambigüité.
    Chaque fois que Dibor devait balayer la chambre de Birima, et que ce dernier était à l’intérieur, Absa allait tirer le rideau et restait dans la cour pour bien voir ce qui s'y passait. « Dépêche-toi, Dibor, tu es trop lente ! criait-elle de temps en temps. Fais ton travail et sors de cette chambre. Une fille bien élevée ne doit pas aimer la compagnie des garçons. » Elle se disait qu'el¬le devait la renvoyer et prendre une autre bonne, mais elle n'avait pas d'autres raisons que ses craintes ou peut-être son intuition.
    Dibor était la sensualité incarnée. Elle avait le beau teint an¬thracite des Sérères du Baol qui faisait que quand on la regardait, on avait envie de l'effleurer, de la toucher, de la caresser. Une divine sculpture d’ébène en chair et en os. Son visage était joli et doux, et sa poitrine semblait deux grosses mangues précieuse¬ment posées au bon endroit. Ses yeux, son sourire, sa voix, sa démarche, ses gestes dégage¬aient quelque chose de terriblement voluptueux. Birima aurait tant voulu l’épouser, mais il savait que son père allait farouchement s'y opposer. Quoi ? Une Sérère ? Animiste de surcroît ? Il savait que rien que d’y penser, Thiéya¬cine en serait tombé mort, sur-le-champ. Il ne savait comment résoudre ce problème. Dibor aussi avait le même problème. Jamais un membre de sa famille, de ses ancêtres les plus lointains jusqu’à sa mère, ne s'était marié avec un Wolof. Son père aurait pu la tuer s'il se doutait qu'elle nourrissait de tels désirs.
    Comme la plupart des jeunes femmes de son village, Dibor travaillait en ville, comme bonne dans une famille. Toutes ensemble, elles quittaient Kouré à la naissance du jour et parcouraient à pied les cinq kilomètres qui les séparaient de leurs lieux de travail. Le soir, elles avaient un endroit où elles s'attendaient les unes les autres, jus¬qu'à ce que le groupe fût au complet. C'était un groupe d'a¬mies, de complices. Sur le chemin du retour, loin de toute autorité, elles s'amusaient follement, se taquinaient, luttaient, se poursuivaient. Quand elles rencontraient quelqu'un de respectable, elles prenaient un air sérieux et le saluaient poliment. Mais dès qu'il s'éloignait, elles se déchaînaient de nouveau. Elles aimaient ces longues marches où elles se retrouvaient seules, se racontaient leurs histoires, leurs passions, leurs désirs, leurs fantasmes, leurs rêves. Elles aimaient surtout parler de sexualité. Ce fut ainsi que Dibor, qui faisait sans cesse des lapsus en appelant tout le monde Birima et mentionnait ce nom à tout bout de champ, finit, sous la pression de ses amies, par avouer qu'elle avait un faible pour le fils aîné de ses employés. Elles changèrent, temporairement, de lieu de rencontre. Le soir, elles passaient « chez Dibor » avant de prendre le chemin de Kouré, donnant leurs opinons sur Birima. Certaines le trouvaient beau, d'autres étaient d'avis contraire. Mais, elles voulaient, toutes, en savoir un peu plus sur ses relations avec Dibor, avoir des détails plus croustillants. Cet amour impossible était un sujet qui les passionnait, d’autant plus qu’elles savaient qu’il était hors de question d'en parler au village. Elles conseillaient à Dibor d'oublier Birima ou de quitter la maison et d’aller travailler ailleurs ou elles essayaient de dédramatiser la situation, lui suggérant, en rigolant, de s'enfuir avec lui. Dibor riait avec elles, mais elle riait jaune.
    Un beau jour, l'inévitable arriva. Dibor était seule à la maison, avec les bambins. Il y avait le baptême d'un très proche parent au quartier Demba Wélé, et tous les membres de la famille s’y étaient rendus. Birima revint, traversa la cour, disant à Dibor qui lavait le linge, qu'il avait oublié quelque chose. Il entra dans sa chambre, l'air préoccupé. Il y resta un bon moment à tourner en rond, aussi mal à l'aise qu'un singe dans une cage. Parfois, il s'arrêtait et regardait, entre le rideau et le bord de la porte, la jeune femme assise à quelques mètres de lui. Elle lui tour¬nait le dos. Il pouvait alors la contempler à loisirs. Lorsque le désir atteint certaines proportions, la raison, piétinée, se sauve en courant. Et tout désir satisfait donne naissance à un autre tout aussi grand. Mais il est des moments où l’on ferme les yeux pour faire quelque chose, et ne les rouvrir que pour constater les dégâts. Il est des gens qui, en faisant du tort, ne peuvent s'arrêter qu'au comble du désastre. Birima savait, mais il ne voulait pas sa¬voir. Il sentait sa raison vaciller, mais il ne voulait pas lui prêter main forte. Il craignait son père, mais Thiéyacine était absent. Il craignait Dieu, mais qui veut se livrer au péché, se débrouille pour oublier son Seigneur ou se dit qu'il a des chances d'être par¬donné. Birima ne voulait pas résister à la tentation. Mais comment al¬lait-il s'y prendre. Comment allait-elle réagir ?
    « Je vais l'appeler », se disait-il résolument, mais, dès qu'il s'apprê¬tait à le faire, toutes ses forces l'abandonnaient. Dibor avait la tête légèrement inclinée vers la gauche, comme un enfant rêveur. Cela la rendait encore plus désirable. Elle recevait le regard de Birima, tel un puissant rayon de soleil braqué sur son dos. Elle n'osait pas se retourner. Elle aussi était confuse. Elle sentait à peine le morceau de savon dans sa main. Son cœur battait si fort que tout son corps en tremblait. « Je t'en prie, Birima, ne m'appelle pas », se disait-elle en pensée, alors que son cœur tenait un tout autre discours. Cette promiscuité, sans témoin, de deux êtres qui se désiraient dans la crainte, avait quelque chose de paralysant.
    Birima n'appela pas. Il n’émit qu’un petit « Pssss ! » entre ses lèvres. Les yeux de Dibor rencontrèrent aussitôt les siens. Ils eurent, tous deux, l'impression que leurs cœurs avaient, d'un coup, cessé de battre. Dibor balaya la cour du regard, pour s'assurer qu'il n'y avait personne et que les enfants étaient en train de jouer dans la rue. Elle courut ensuite, comme pour rattraper le temps perdu, rejoindre l'homme qu'elle aimait. Ils se passèrent de mots. « Les perles » qu’elle avait autour des reins « étaient étoiles sur la nuit de sa peau. » Ce fut pour elle un moment intense, un mélange de douleur, de plai¬sir, de peur et d'insouciance, dont elle se souviendra toute sa vie. Birima découvrit « une bouche qui fit lyrique sa bouche, une savane aux horizons purs, un tam-tam sculpté, tam-tam tendu et grondant sous ses doigts de vainqueur, une voix grave de contralto, le chant spirituel de l’Aimée. » (Pardonnez-moi, papa Senghor, d’avoir ainsi travesti vos vers si majestueux !)
    Après, Birima retourna à son travail. Dibor finit la lessive le mieux qu'elle put. Elle changea de pagne pour laver l'autre sur lequel il y avait quelques taches de sang. L'irréparable venait d’avoir lieu.
    Ce soir-là, sur le chemin qui menait à Kouré, elle riait avec ses amies, sans écouter ce qu'elles disaient. Elle ne savait pas ce qui lui arrivait. Elle était inquiète et satisfaite à la fois. Elle éprouvait un grand bonheur qu'une crainte sournoise ternissait par moments. C'était un secret qu'elle voulait garder pour elle seule.
    Birima aussi garda son secret. Les amants s'évitèrent pendant des semaines, comme s'ils avaient honte de ce qu'ils avaient fait. La raison revenait à sa place, mêlée à un senti¬ment de culpabilité qui luttait âprement contre le désir de réitérer l'action. Très vite, ils tombèrent dans la paranoïa. Tout regard braqué sur eux, était un regard qui perçait leur secret.


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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-05-31, 06:11

    Waww que d'émotions Embarassed cette famille de Dof c'est vraiment espotouflante.
    Pourquoi les belles histoires d'amours ont toujours du mal à s'épanouir.
    Bravo à vous l'histoire est trés belle vivement la suite, on espére que notre grand-mère va aider pour que nos jeunes gens retrouvent le sourire.

    Au fait c'est quoi un rire jaune ?
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-05-31, 08:39

    Nemam a écrit: on espére que notre grand-mère va aider pour que nos jeunes gens retrouvent le sourire.
    Je l'espère aussi.
    Un rire jaune est un rire forcé. On rit juste avec les muscles du visage alors que l'esprit est ailleurs et n'a point envie de rire.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-05-31, 09:28

    Ok Man Nit KI merci je connaissais pas
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-03, 03:16

    MAAM MAREME (SUITE)

    Plus le temps passait, plus Dibor avait du mal à dormir. Elle était anxieuse. Son ventre se gonflait. Elle pensait qu'elle était enceinte. Et en effet, elle l'était. Cela n'arrive pas qu'aux autres. Elle pleurait, mais personne ne devait voir ses larmes. Elle ne voulait en parler à personne, même pas à ses amies les plus proches. Elle vivait son calvaire, toute seule. Elle nouait son pagne aussi serré qu'elle le pouvait autour de son ventre, pour comprimer l'embryon. Son pagne était parfois si serré qu'elle avait du mal à respirer. Elle ne mangeait qu'à peine, ne voulant pas nourrir cette chose dans son abdomen, qui ne cessait de grossir. Elle ne savait rien de l'avortement. Tout ce qu'elle espérait, c'était une grossesse discrète, si discrète qu'elle pourrait accoucher en cachette, puis étrangler le bébé, l'étouffer ou le déposer au coin d'une rue ou sur un tas d'ordures. Ces pensées la tourmentaient. Elle serait incapable de tuer son enfant. Elle finit par se dire, avec un pincement au cœur, que le mieux serait d'aller dans une ville où elle ne connaissait personne, de dire à quelqu'un : « Voulez-vous surveiller mon bébé ? Je vais acheter quelque chose, je reviens dans un instant », et disparaître dans la nature. Il lui faudrait, soit tuer le rejeton dès sa naissance ou l'abandonner quelque part ou alors, si les choses tournaient mal, se jeter dans un puits avec lui. Elle se disait qu'elle n'avait pas d'autre solution. C’était pourquoi elle ne pouvait pas en parler à Birima, ce qui la faisait souffrir davantage.

    Les choses tournèrent mal. Même la mère la plus inattentive s'aperçoit, au bout de cinq mois, que sa fille est enceinte. Ndila Faye suspectait Dibor, mais n'osait croire ce qu'elle voyait. Pourtant, tout était là pour lui dire qu'elle ne rêvait pas. La grosseur des seins, le goût pour certains aliments, les nausées… Un soir, elle la surprit dans sa chambre en train de se tâter le ventre. Elle cria : « Le malheur est arrivé ! Dibor, qu'as-tu ? » La jeune femme, affolée, tenta de se sauver. Sa mère la retint, déchira sa marinière pour bien mettre son ventre ballonné en évidence et hurla :

    - Dis-moi qui c'est ou je te tue !

    Une lutte s'ensuivit. La mère eut le dessus. Dibor, par terre, essayait d'échapper à ces mains enragées qui, telles des tenailles, serraient sa gorge. C'était la première fois que Ndila s'acharnait sur elle de la sorte. « Qui t'a fait ça ? Dis-le ou je te tue ! » Sur ces entrefaites, arriva le père, attiré par les hurlements. Le comble. Ngor Sène n'était pas du genre à supporter le déshonneur. Dibor se sentit perdue.

    - Que se passe-t-il ?

    - Dibor est enceinte. Regarde-la ! cria Ndila en lâchant sa fille.

    Ngor, interdit, considéra l’accusée qui se relevait, pleurant et essayant de renouer son pagne. Il jura, hors de lui. D'une puissante gifle qui traduisait bien sa colère, il projeta la jeune femme au sol. Dibor savait ce qui l'attendait. Elle se mit à crier à pleins poumons, espérant être secourue avant d'être lynchée par ses parents. Ngor enleva précipitamment son boubou qui le gênait et défit le grigri qu'il avait autour des reins. C'était une lanière en peau de vache cousue autour de quelque chose, des papiers sans doute, un terrible fouet dont chaque coup déchirait la chair sous la peau. Les coups pleuvaient, impitoyables, sur le corps de la jeune femme enceinte. De toutes ses forces, Ngor tapait aveuglément, tandis que sa femme l'encourageait par des « Tue-la ! Tue-la ! Qu'elle meure ! » Dibor s'était ramassée en boule, avait placé ses mains sur sa tête pour protéger son visage et poussait des cris à réveiller un mort : « Au secours ! Au secours ! »

    Dans tout le village, on entendait les appels de la malheureuse. Chacun sortit de sa concession et se dirigea vers la maison de Ngor Sène, se demandant ce qui pouvait bien s’y passer. Nul n’ignorait que Dibor était une fille tranquille qui n'avait d'histoires avec personne.

    Il fallut trois hommes pour maîtriser Ngor et le faire sortir de la case. Bien que les coups eussent cessés, Dibor avait l'impression de les recevoir encore. Tout son corps était en feu. Elle avait sur le dos, les bras, les jambes et même sur le visage, des traces pareilles à des digues qui se croisaient dans tous les sens. Des femmes allèrent la chercher et, l’aidant à marcher, en profitèrent pour lui demander avec qui elle avait eu des rapports. Elle se garda bien de leur répondre. La cour était remplie de monde. Des regards curieux, compatissants ou désapprobateurs scrutaient son visage en larmes. Elle rassembla ses dernières forces, se fraya, en jouant des coudes, un passage à travers la foule, releva son pagne et se précipita vers le puits du village. Sa cousine et meilleure amie, Satou Ndong, devinant ses intentions, courut après elle. Au terme d’une longue poursuite, elle se jeta sur elle et toutes deux roulèrent par terre, à quelques mètres du puits. Le pire était évité. Dibor passa la nuit chez sa cousine qui n'eut aucun mal à lui faire lâcher le morceau. Satou raconta tout à sa mère qui, à son tour, rapporta tout à son mari, lequel mit immédiatement ses chaussures pour aller informer Ngor Sène et Ndila Faye. Ces derniers eurent beaucoup de mal à contenir leur surprise, leur honte et leur colère. Cette nuit-là, ils n’arrivèrent pas à dormir.

    Le lendemain, de très bonne heure, Ngor alla chercher sa fille, la fit monter sur une charrette et l'emmena à son lieu de travail. Birima était en train de prendre son petit-déjeuner lorsqu'il les vit franchir la porte de la cour. Ngor avait l’air grave. Il poussait rageusement sa fille devant lui. Birima comprit que l’heure n’était pas à la rigolade. Cette visite ne présageait rien de bon. Dibor avait un pagne lui servant de voile pour cacher son embarras, ses yeux gorgés de larmes et les traces de coups sur son visage. Son père ne perdit pas de temps en salamalecs. Il fit appeler le chef de famille et lui parla sans détours :

    - Votre fils a offensé ma fille.

    - Quel fils ? demanda Thiéyacine Diouf.

    Les autres membres de la famille sortirent de leurs chambres pour mieux écouter. Seul Birima se faisait tout petit dans son coin. Son cœur battait la chamade.

    Ngor se retourna vers Dibor et lui hurla quelque chose en sérère.

    - Birima, fit-elle d'une voix cassée par les cris de la veille.

    Thiéyacine échappa de justesse à une crise cardiaque. Il s'essuya nerveusement le visage, cracha par terre et interpella son fils. Birima ne savait où se mettre. Il s'approcha timidement, essayant tant bien que mal de cacher son appréhension. Connaissant les colères de son père, il tressaillit en l'entendant lui demander d'un ton dénué de toute douceur :

    - Birima, qu'est-ce qu'il y a entre cette fille et toi ?

    Le jeune homme ne sut quoi répondre. Son silence était un aveu. Il avait, comme Dibor, la tête baissée. Leurs regards ne se rencontrèrent point.

    « Réponds, chien de malheur ! » cria Thiéyacine en envoyant à son fils une gifle qui le fit chanceler.

    Birima recula de quelques mètres. Son père s'empara d'un pilon qui traînait dans la cour, et se rua vers lui, les yeux exorbités de rage. Les femmes poussèrent des cris stridents. Birima se sauva, heurtant les badauds qui s'étaient rassemblés devant la porte. Thiéyacine, injuriant, se mit à ses trousses. Ne pouvant le rattraper dans la rue, il lui jeta le pilon qui le rata d'un poil. Il était dans tous ses états, le père Thiéyacine. Il revint, fulminant, dans la cour et éleva la voix :

    - Je jure par Dieu, par le Prophète, par le Marabout de Touba, que je renie ce fils qui a commis une telle turpitude. Si Birima a été mon fils jusqu'à ce jour, désormais, il ne l'est plus. Je n’ai plus rien à faire avec lui. Je ne veux plus que son pied entre dans ma maison. Et si Dieu me rappelle à Lui, je ne veux pas qu'il vienne à mon enterrement et je ne veux pas qu'il reçoive quoi que ce soit en héritage, pas même un grain de sable provenant de cette cour. Qu'il aille où il veut, mais hors de ma vue, s'il tient à sa vie.

    Là-dessus, il présenta ses excuses à Ngor Sène et regagna sa chambre. Ngor se retourna vers sa fille qui pleurait :

    - C'est pareil pour toi. Ne remets plus les pieds dans ma maison, lança-t-il, en sérère, avant de sortir sans dire au revoir.

    Le silence était pesant.

    Absa Ndiaye regretta de n'avoir pas licencié Dibor quand il était encore temps. Elle l'avait pressenti, ce malheur. Elle appela la jeune femme dans sa chambre, s'entretint longtemps avec elle pour en savoir plus sur ce que son fils avait fait, lui paya son salaire et promit de rester en contact avec elle.

    Dibor retourna à Kouré. Elle s'installa dans la famille de sa cousine Satou Ndong. Elle sortait rarement et ne parlait presque plus à personne.


    (A SUIVRE)
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-06-03, 05:22

    Crying or Very sad Crying or Very sad Crying or Very sad c'est juste une histoire écrite à la perfection mais je ne peux pas m'enpêcher d'avoir le coeur lourd. Crying or Very sad Crying or Very sad
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Abssiss BABISTO 2007-06-03, 08:07

    Une divine sculpture d’ébène en chair et en os [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi) - Page 2 Smilies6 J'ai vraiment aimé ça Embarassed !

    Au fait, je suis toujours en cours de lecture (c'est peut-etre ça, bu leen ma ko jàppee Embarassed ) mais je vois que tu pourrais faire de Dibor la nièce au vieux, ou à Absa (en tout cas la cousine de Birama, même éloignée ça ira).
    Je le dis car dans les villages, surtout que tu as précisé "petit" village, il n'est pas fréquent de voir ce phénomène de "bonne".
    En général, dans chaque famille, il y a une petite fille qui s'occupe plus ou moins de ces types de travaux Embarassed !
    Parfois aussi c'est la "topp" de la nouvelle mariée (sa soeur parfois Wink ).
    Dans une ambiance villageoise, il pourrait mieux être adapté si on avait ce genre de lien entre Dibor et la famille d'accueil Embarassed !

    Mais.... rétaane .... puisque tu as aussi dit "près de Diourbel" la "perversion citadine Embarassed (dans le mode de vie bien sûr Wink )" pourrait être à l'origine de cette conversion des attitudes des villages environnants !
    Si c'est cela, alors ça roule, sinon, je préfère la "cousine" !

    En fait peut-être que j'ai mis la charrue avant les boeufs car j'ai pas fini Embarassed ! Soyez indilzang rétaane !

    Je reviens !
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-03, 12:11

    Oui, Petit Thiam, je vois que tu n'as pas lu ce passage :

    Comme la plupart des jeunes femmes de son village, Dibor travaillait en ville, comme bonne dans une famille. Toutes ensemble, elles quittaient Kouré à la naissance du jour et parcouraient à pied les cinq kilomètres qui les séparaient de leurs lieux de travail. Le soir, elles avaient un endroit où elles s'attendaient les unes les autres, jusqu'à ce que le groupe fût au complet. C'était un groupe d'amies, de complices. Sur le chemin du retour, loin de toute autorité, elles s'amusaient follement, se taquinaient, luttaient, se poursuivaient. Quand elles rencontraient quelqu'un de respectable, elles prenaient un air sérieux et le saluaient poliment. Mais dès qu'il s'éloignait, elles se déchaînaient de nouveau. Elles aimaient ces longues marches où elles se retrouvaient seules, se racontaient leurs histoires, leurs passions, leurs désirs, leurs fantasmes, leurs rêves.
    Je vais donc être indilzang.Wink
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Abssiss BABISTO 2007-06-03, 12:14

    Sant Yallah rék kay fimu né nii héhé héhé !
    J'étais presque sûr que j'avais pas saisi : paresse quand tu me tiens Crying or Very sad pale !

    Ok j'y reviendrais donc, lii moom leer na naññ Embarassed

    Merci !
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-06, 05:38


    MAAM MAREME (SUITE)


    Maam Marème pleura, lorsqu’elle apprit le péché de son « petit-fils ». Birima Diouf, chassé par son père, était venu, de lui-même, se confesser.

    « Pourquoi as-tu fait ça ? » lui demandait-elle, encore et encore. Il ne trouvait rien à lui répondre.

    Maam Marème passa la nuit et une bonne partie du lendemain à prier. Sa peine était grande, mais elle s'efforçait de comprendre la situation et comptait sur la clémence divine. Elle avait une foi inébranlable. Elle savait que Dieu écoute la prière. « Croire, disait-elle, c'est être certain de ce que l'on n’a pas encore vu de ses propres yeux. La foi absorbe le doute et ne laisse nulle place au désespoir. Rien ne me surprend, rien ne m'étonne, car je sais que tout vient de Dieu. C’est Lui qui nous a créés, nous et ce que nous faisons. Et c’est Lui qui pardonne les péchés. »

    Le vin était tiré, il fallait le boire. Maam Marème pensa qu'il fallait marier Birima et Dibor, tout en sachant que la tâche n'allait pas être facile. D’un côté, il y avait Thiéyacine qui, ayant publiquement renié son fils, ne risquait pas de revenir sur sa parole, de l’autre, les Sérères outragés qui ne voudraient sûrement pas donner la main de leur fille à un Wolof, et entre les deux, la loi divine. Dibor était animiste, or un croyant ne doit épouser qu'une croyante. Maam Marème prit son bâton de pèlerin. Aussi souvent que ses vieux os le lui permettaient, elle prenait une charrette pour se rendre à Kouré et s’entretenir avec Dibor et ses parents qu’elle voyait séparément. Elle plaidait pour les sentiments qui liaient les jeunes gens. Elle allait aussi, presque tous les jours, voir Thiéyacine Diouf et Absa Ndiaye. Il lui fallut beaucoup de tact, de patience, de persévérance. Le miracle eut lieu. Par amour, la jeune femme déclara qu’elle était prête à se convertir à l'Islam. Maam Marème ne voyait alors plus aucun obstacle majeur à une telle union, elle qui disait que le prophète Muhammad lui-même, avait épousé des femmes de différentes tribus, et que le Marabout de Touba, son guide spirituel, était favorable aux mariages entre castes et ethnies différentes.

    Ce fut « le mariage de la honte », disent encore les mauvaises langues. Il n'y eut pas grand monde aux cérémonies, mais les mères des concernés, enfin attendries, étaient présentes, tandis que les pères, choqués, blessés jusqu'au plus profond d'eux-mêmes, s'opposèrent à cette alliance et en voulurent à la vieille femme qui en fut très affligée sans pour autant regretter ce qu'elle avait fait. Elle avait réussi à convaincre les mères et elle avait le soutien de certains dignitaires. Cela lui suffisait. Du côté de Dibor, l'oncle maternel était en faveur du mariage et, chez ces Sérères-là, l'autorité de l'oncle était si grande qu'elle surpassait celle du père.

    Maam Marème passa, par la suite, beaucoup de temps à essayer, en vain, de réconcilier les pères avec leurs enfants.

    Elle donna au couple la chambre de son mari décédé depuis quelques années, chambre dans laquelle Birima dormait déjà, ne pouvant retourner chez son père. Les autres chambres étaient plus ou moins transformées en dépôts, en attendant de nouveaux enfants qui ne venaient pas. Maam Marème avait été seule pendant presque deux ans. Elle exhortait les jeunes mariés à prier avec ferveur pour la rémission de leurs péchés.

    A soixante-treize ans, elle vit naître son premier « arrière-petit-fils », puis, deux ans plus tard, une « arrière-petite-fille ». Quand Sakhéwar, le troisième enfant de Birima et Dibor, naquit, Maam Marème avait soixante-dix-sept ans.

    Peu de temps après, Dibor retourna à Kouré, avec son mari et ses enfants, car sa mère, devenue veuve, était très malade. Elle ne voulait plus remettre les pieds à Kouré, mais Satou, sa cousine, insistait, et Maam Marème pensait que c'était un devoir à accomplir. Dibor retrouva très vite sa place dans son village natal. Birima et les siens n'eurent pas trop de mal à s’intégrer.

    Maam Marème resta de nouveau seule dans sa maison. Elle invita Ndiakhate Léye, un cousin un peu moins vieux qu'elle, à occuper la chambre vacante, pour lui tenir compagnie. Les enfants du quartier l’appelaient Maam Ndiakhate parce qu’il avait, lui aussi, l’âge d’un grand-père.

    Par la suite, Birima et Dibor confièrent Sakhéwar à Maam Marème. Le garçon avait un peu plus de trois ans. Convaincue que cet enfant était le dernier avec qui elle allait vivre dans sa maison, la vieille femme lui accorda un traitement de faveur.

    (A suivre)



    Dernière édition par le 2007-06-06, 17:15, édité 1 fois
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-06-06, 10:09

    encore Bravo comme on s'y attendait Mame maréme est en train dans la danse et a fait d son mieux. le pére de Dibor est mort sans faire la paix avec sa fille c dommage.
    Un traitementde faveur pour notre petit Sakhéwar ne présage rien de bon mais on attend de voir.

    Pourquoi il ya tjrs des fautes frappe au niveau des noms scratch on arive pas à les lire qq fois.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-06, 17:19

    Merci, Nemam.
    J'ai corrigé les noms. Ce ne sont pas des fautes de frappe, c'est le "site" qui les déforme. Demande à Petit Thiam.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-06-06, 17:25

    ok je vois
    dis moi les histoires que tu racontes ce sont le fruit de ton imaginations ou bien tu t'inspires des vécus de certaines personnes.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-07, 03:37

    Bin, Nemamy, en voilà une question. scratch
    Presque tous les textes que Sama Dofbi et moi avons postés sur Senediaspora sont extraits d’ouvrages déjà publiés. Les nouvelles viennent des NOUVELLES FANTASTIQUES SENEGALAISES (L’harmattan – 2005) et Maam Marème est la première partie du roman LE PARRICIDE (L’HARMATTAN – 2005)

    L’imagination ne sort pas du néant. Elle nait de la réalité qu’elle amplifie, transforme selon l’inspiration de l’auteur. Parfois la source et le résultat n’ont rien à voir.

    La nouvelle LEUK DAWOUR MBAYE nous est venue à l’esprit, mon mari et moi – nous écrivons ensemble – quand nous avions entendu un jeune Sénégalais raconter qu’il avait vu une nuit un cheval tout blanc qui n’avait qu’une patte. Il disait que leurs regards s’étaient croisés et qu’après, il avait suivi le cheval jusqu’à le voir s’enfoncer dans la mer. Nous l’avions cru. Et un ami de se moquer de nous en disant : "Vous êtes vraiment naïfs. Ne voyez-vous pas que ce garçon raconte des histoires à dormir debout ?" A l’époque, nous avions une amie toubab, issue d’un milieu bourgeois, qui avait des problèmes avec ses parents qui "lui pompaient l’air". Et de cela est sortie la nouvelle LEUK DAWOUR MBAYE.

    MADOU DIALANE est une nouvelle inspirée de faits divers. On entend souvent parler de femmes enceintées par des charlatans. Vous en savez autant que moi. Ces messieurs abusent souvent de leur patientes.

    FANTA SARR (extrait d’un autre roman). J’avais un oncle lointain, un petit bout d’homme tout maigre. Comme il était pauvre et n’avait pas de femme, les parents avaient arrangé le mariage en lui donnant une parente (veuve, je crois) comme épouse. C’était une grosse Sénégalaise, assez turbulente. Ils se disputaient souvent. Un jour j’avais entendu le bonhomme raconter à ma mère et ses coépouses qu’il s’était disputé avec sa femme durant la nuit, mais que lui, n’avait pas un dit un mot. "Je suis resté couché, ne nemm rekk, bayyi ko muy mbel-mbeli…" Et cela nous amusait, nous les enfants. Une grand-mère parla un jour d’une jeune femme que son père battait et enfermait dans une chambre parce qu’elle sortait avec un Libanais. Elle disait : "C’est mon Libanais tout rouge que j’aime…" J’ai mélangé les deux femmes pour "créer" Fanta Sarr. Sarr, parce que je suis Thiam (C’est pourquoi le jeune Babel est Petit Thiam). Les Saar et les Thiam sont des kal.

    BADOU ET NOGOYE (Extrait du même roman). C’est tout inventé. J’ai juste imaginé une situation et j’y ai placé mes personnages.

    L’ÂME SŒUR. On racontait au Sénégal, qu’une nuit, un homme avait rencontré une femme. Il lui avait donné sa veste parce qu’elle avait froid. Le lendemain, il s’était rendu à l’adresse qu’elle lui avait donnée. Elle est morte depuis longtemps lui avait-on dit. Il s’était rendu aux cimetières et avait trouvé sa veste sur la tombe de cette femme.

    MAAM MAREME. On m’a raconté que ma grand-mère vendait ses bijoux et avait ouvert un passiong – dont je me souviens encore -, pour aider son mari. On raconte aussi qu’elle avait commencé à bâtir sa maison. Mais elle n’était pas stérile.
    Dibor et Birama. Il y a des garçons qui ont des rapports sexuels avec les bonnes de leurs parents. J’ai donc imaginé une situation… Une fois la fille enceinte, on peut imaginer les réactions des parents. Et vu la personnalité de Maam Marème, elle devait intervenir.

    "MES" AVENTURES [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
    (un extrait des NOUVELLES FANTASTIQUES SENEGALAISES) étaient racontées par un vieil homme. J’en ai rajouté une bonne dose, bien entendu.

    BIKIRA [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
    est une histoire vraie. Je n’ai rien inventé. J’ai juste raconté ce qui s’était passé.

    Pour les INTERVIEWS, je m’inspire souvent d’un petit détail.
    Par xemple, BINEBINE 22 (Ce n'est la sauvage Bint0705) ait comme avatar la photo d’une femme hyper maquillée, et les filles se moquaient d’elle en lui disant de diminuer son maquillage, ce qui a donné :

    Radio Fann : Du jamais vu depuis le début de ces élections ! Une candidate et son clone étaient devant le jury.
    Binebine22 : Vous savez bien que ce n'est pas mon clone.
    Radio fann : Avouez quand même que vous-même l'aviez cru.
    Binebine22 : Pour un choc, c'en fut un.
    Radio fann : Deux Binebine22, face à face.
    Binebine22 : Cette Kimy, bilaay wor na ma. C'est la jalousie. Elle a toujours été jalouse de moi. Depuis notre plus tendre enfance. Mais je suis plus belle qu'elle. Elle n'a qu'à le reconnaître. La preuve, elle a été éliminée avant moi. Et moi qui la tenait pourtant pour une amie. (Elle verse une larme, une seule qui se colle à sa joue à cause de l'excès de maquillage. Epaisseur du maquillage sur le visage : deux centimètres.)
    Radio Fann : De grâce, n'essuyez pas cette larme ! Pour ne pas causer quelques dégâts...
    Binebine22 : Je n'avais l'intention de le faire.
    Radio Fann : Allez ! Continuez donc !
    Binebine22 : Kimy, après son élimination, s'était rapprochée de moi, me disant sans cesse que j'étais désormais sa candidate et qu'elle allait tout faire pour que je devienne Miss Seneweb 2007. Elle s'occupait de mon habillement, de mon maquillage, de mon alimentation, de tout. Elle me coatchait bien comme il faut. Moi, je lui faisais entièrement confiance. Le jour défilé, j'étais devant tout le monde, di daagu... Et brusquement, que vis-je ? Kimy qui sortait des vestiaires, ... avec ... mon sosie qu'elle tenait par la main. Je me dis que Paciax avait encore fait un miracle. C'était comme si je me regardais dans une glace... Avais-je une soeur jumelle sans le savoir ? La stupection régna dans la salle. J'étais pétrifiée, abasourdie... Je ne trouve pas les mots... De plus, elle portait les mêmes vêtements et les mêmes bijoux que moi.... Elles s'arrêtèrent à quelques pas de moi. Kimy s'adressa à l'assistance : "Je vais vous montrer qui est Binebine22." Elle prit un arrosoir et se mit à laver mon sosie. La stupeur ! ... On vit apparaître un ourang-outang !... Et Kimy de dire : "Binebine22 n'est qu'un ourang-outang maquillé !"
    (Elle éclate en sanglots et ses larmes, creusant la couche de maquillage, laissent apparaître des poils qui n'ont rien d'humain.)


    Pour l’interview de Fatim, Sita avait dit :
    MANE dé sama quotient intellectuel dé élevé na ,
    mane kaye fatim la si yeureum,
    ah dama dégue rék gnounane bop bi dara nékoussi , madame membre du jury!
    Et Fatim avait répondu :
    bon moi je sais ke 2+2 egal 8 voila point barre
    dakh ici on calcul en fonder
    Résultat :

    Radio Fann : Pour tester nos micros et pour voir si nos auditeurs sont à l’écoute, notre consultant Khaf reçoit la candidate Fatim.
    Khaf : Bonjour, Fatim !
    Fatim : Vous pouvez m’appelez Fifinette, ça fait plus intime.
    Khaf : Sita prétend que vous ne connaissez pas la table 2. Commençons donc par la table 1. Vous la connaissez ?
    Fatim (elle crie) : Ah ! Non ! Je ne suis pas d’accord ! La table 1 n’existe pas. Je ne l’ai jamais apprise à l’école. Je vois que vous êtes contre moi.
    Khaf (essayant de la calmer) : Ok. Formulons la question autrement. 1 x1 = ?
    Fatim (Elle sourit) : Une fois une ? Mon pili fort et moi ? Nous ne faisons qu’un.
    Khaf : Bonne réponse. 1 x 2 = ?
    Fatim : Heey, c’est hors de question. Je ne veux pas de coépouses. Pas de 1 x 2 ni 1 x3. Table 1 moom, ça se limite à 1 x1. Mon homme et moi rekk.
    Khaf : passons donc à la table 2.
    Fatim : une table suffit ? Je ne suis pas encore mère de famille.
    Khaf : euh… disons 2 x1 = ?
    Fatim : Dites donc, me prenez-vous pour une dingue ? Je viens de vous répondre. On peut changer les positions, mais l’acte reste le même. Donc vaut mieux se marier avant et rester monogame
    Khaf : non, c’est du calcul. C'est pour texte votre QI.
    Fatim : Je n’ai pas ma calculatrice avec moi. Mais j’avais appris 2 x 2 et les autres… 3 x2 , 4 x 2. Seulement j’ai tout oublié. Plus on apprend, plus on oublie donc à quoi bon apprendre ? Et puis, laissez mon Q en paix, il n'est pas pour vous.
    Khaf : D’accord, mais la table 2 quand même…
    Fatim : vous voulez savoir si j’ai deux yeux, deux oreilles, deux jambes ?
    Khaf : Ce n’était pas la question, mais passons. Un peu de géographie maintenant. Quelle est la montagne la plus élevée du globe ?
    Fatim (Elle se lève et touche ses fesses) : Si ce n’est pas le Kilimandjaro, c’est le mont Everest. C’est mon pili fort qui les appelle ainsi.
    Khaf : Quel est le pays dont Athènes est la capitale.
    Fatim (Elle touche son ventre) : En tout cas, ce n’est plus ici car je n’ai plus de graisse. Depuis que je candi……………………
    Radio Fann : Coupure d’électricité ! Ah ! La Senelec !
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Tyf 2007-06-07, 03:37

    C'est trop beau comme histoire, j'attends la suite. Merci encore.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-07, 03:55

    MAAM MAREME (suite)


    Sakhéwar était le « chef de famille ». Chaque matin, Maam Marème lui demandait ce qu'il voulait manger. Il répondait selon ses caprices, et la vieille femme allait passer la commande à Bigué Ndiaye, une femme qu’elle avait aussi élevée et qui habitait tout près. Ou alors, elle s’adressait aux voisines pour savoir s’il y en avait une qui préparait le plat que le garçon réclamait. Les désirs de Sakhéwar étaient des ordres. Le voisinage tolérait tout ce qu'il faisait, sachant à quel point Maam Marème tenait à lui faire plaisir. Personne ne le frappait, personne ne le grondait. Dans ses crises de colère, il lui arrivait de renverser les calebasses des femmes qui malaxaient le couscous ou d’y jeter du sable, et s’en sortir impuni.

    Maam Marème et Maam Ndiakhate allaient tous les jours en ville et ne rentraient que le soir, vers le crépuscule. Les enfants du quartier guettaient leur retour. Dès qu'ils les voyaient arriver, ils couraient vers eux en chantonnant : « Grand-mère, qu'as-tu rapporté ? » ou « Grand-père, qu'as-tu rapporté ? » Souvent, ces vieillards partaient en même temps, mais il était rare de les voir revenir ensemble. En tout cas, ils rapportaient, tous deux, des biscuits ou des bonbons qu'ils distribuaient à toutes ces petites mains qui tiraient leurs boubous dans tous les sens.

    Sakhéwar aimait rester seul à la maison. Il y avait derrière la chambre de Maam Ndiakhate, une grande carafe métallique rouillée et parsemée de trous qu'il tenait pour son cheval. Il s'asseyait dessus et jouait au cavalier, s'écorchant les genoux contre le sol.

    A certaines heures de la matinée, une tourterelle se perchait sur une des branches du baobab derrière la palissade et chantait : « Saaxewar rekk ak këram ! » (Sakhéwar, tout seul dans sa maison !) L'enfant, persuadé que tel était le ramage de la tourterelle, se plaignait auprès de sa grand-mère de cet oiseau goguenard. Un jour, elle lui donna un lance-pierre rudimentaire et lui conseilla de s'en servir. Les pierres passaient à peine par-dessus la palissade, mais Sakhéwar était satisfait car c'était suffisant pour chasser le volatile.

    L'après-midi, il allait jouer avec ses camarades. Quand ils ne se battaient pas, les enfants ramassaient des fils de fer pour fabriquer des voitures, des vélos et surtout des motos, comme celles de Diouf et Kébé, deux policiers de la ville, qui circulaient avec ces impressionnants véhicules. Tout petit garçon de Diourbel rêvait d'être policier, rien que pour conduire des motos. Sakhéwar était fier d’avoir le même patronyme que l'un des motards.

    Les gosses cependant ne faisaient pas que de la mécanique. Ils allaient régulièrement saccager les vergers derrière les habitations. Ils montaient sur les arbres fruitiers, ou jetaient des pierres quand l'arbre était épineux ou d'accès difficile. Ils se gavaient de mangues, de jujubes et de goyaves, dont ils laissaient une grande quantité sur place. Ils déterraient des pommes de terre, des navets, des betteraves, arrachaient des salades, et se sauvaient dès qu’ils voyaient un jardinier s’approcher. Maam Marème recevait beaucoup de plaintes, mais elle ne blâmait jamais les petits monstres. « Ce sont des enfants, pardonnez-leur. Ils ne le referont plus », plaidait-elle.

    Les garçons avaient aussi une autre spécialité : la chirurgie. Ils tuaient et disséquaient toute petite bête qui avait le malheur de tomber entre leurs mains dites innocentes. Les sauterelles et les papillons étaient minutieusement réduits en pièces détachées. Les enfants se frottaient le pubis avec les ailes des papillons, disant que cela faisait pousser des poils à cet endroit. Les hérissons en boule étaient posés sur le dos, et les enfants leur versaient de l'eau à l'endroit où ils devinaient le visage. Dès que ces pauvres bêtes se dépliaient, une tige métallique leur perforait le ventre. Les oiseaux étaient tenus par le cou et secoués avec une force telle que la tête se détachait du reste du corps. Les tortues recevaient de grosses pierres qui leur fracassaient la carapace. Certains insectes avaient des fils noués entre l'abdomen et le thorax, les enfants tenant les fils par l’autre bout pour faire voler leurs « avions ». Les ovins devenaient des chevaux, et ils leur mettaient du piment aux fesses pour les faire courir plus vite et bêler plus fort. Les iguanes et les lézards étaient lapidés, puis éventrés.

    Ce fut à cette époque que Sakhéwar vécut sa seule mauvaise expérience avec sa grand-mère. Il était malade, et elle l'avait emmené au dispensaire. L'infirmier devait lui faire une piqûre dont il avait peur. Une peur bleue. La seringue l'effrayait. Il avait couru vers sa protectrice et avait passé ses petits bras autour de ses jambes, hurlant de panique. Maam Marème l'avait alors neutralisé dans cette position, le tenant fermement par les bras, et l'infirmier avait fait son travail. Cette scène, Sakhéwar s'en souviendra toute sa vie. Dans sa tête d’enfant, c'était comme si elle l'avait trahi.

    Il y avait, chaque année, une campagne de vaccinations publiques. Comme tout le monde ne possédait pas la radio, l'annonce se faisait en voiture, avec un haut-parleur. Une camionnette parcourait la ville, et une voix disait que les enfants devaient se rendre au dispensaire pour se faire vacciner. Contre quoi ? Les enfants ne le savaient jamais. Au début, les vaccinations se faisaient avec des plumes qui produisaient une ou deux cicatrices, de petits traits, puis ce fut avec des espèces de pistolets qui laissaient des plaies durables et des cicatrices pareilles à des pièces de monnaie.

    (A SUIVRE)
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-07, 04:14

    Merci, Tyf !

    Petit Thiam, si tu ne lis pas, ne fais pas de commentaires et ne réclame pas la suite. Ehey
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Tyf 2007-06-07, 04:15

    Cela me rappelle mon enfance, les vacinations, les atrocités sur les animaux, les pauvres... Encore merci.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-06-07, 12:28

    wawwww Man Nit Ki je suis impréssionnée, ta façon de réunir des histoires totalement différentes, je trouve ça formidable. A la fin on dirait qe tout est vrai. Tu as une inspiration hors du commun surtout concernant les interviews.

    je reviens pour la suite j'ai pas encore lu.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-06-07, 13:04

    En effet Tyf ça rappelle notre enfance, les jeux et vaccinations. Merci Man Nit Ki de vouloir nous plonger dans nos souvenirs d'enfance monkey
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-11, 11:39

    MAAM MAREME, (Suite)

    Tous les enfants adoraient les fêtes comme la tabaski, la korité et le tamkharit.

    La tabaski est ce que l’on appelle « Aïd el Kabir » en arabe, une fête musulmane qui commémore le jour où Dieu avait demandé à Abraham de sacrifier son fils aîné, Ismaël. Il est dit que Dieu, voulant tester la foi d’Abraham, lui avait ordonné de sacrifier son fils. Comme ce prophète était déterminé à le faire, Il lui envoya un bélier qu’il immola à la place. Chaque année, les musulmans célèbrent cette date en sacrifiant des béliers. Maam Marème, comme tant d’autres Sénégalais, achetait son mouton quelques semaines auparavant. Les marmots s’en occupaient ensuite. Ils donnaient à manger et à boire aux animaux. Parfois, ils les emmenaient dans les champs pour les laver, et souvent, ils organisaient des combats pour voir lequel était le plus fort. Aux pauvres moutons devenus gladiateurs malgré eux, les enfants donnaient des noms de héros. Chacun tenait le sien par une corde attachée au cou et l’encourageait. « Vas-y ! », « Bravo ! » Après ces joutes, ils les lavaient et les ramenaient à la maison. Quelques jours avant la fête, les parents achetaient des vêtements neufs pour les membres de leurs familles. Maam Marème demandait toujours à son neveu Bara Niang, qui était tailleur, de coudre des vêtements pour les enfants dont elle s’occupait. Le jour-J, ces derniers se levaient de très bonne heure, complètement excités. Dans beaucoup de maisons, des transistors étaient allumés. On entendait des versets du Coran ou des chants religieux. On balayait les cours et on allumait de l’encens. Il régnait une atmosphère tout à fait spéciale. Les petits garçons se lavaient et mettaient leurs beaux vêtements neufs. Ils sortaient ensuite avec leurs pères pour se rendre à la mosquée, gardant sous l’aisselle, le tapis de prière. Les fillettes restaient à la maison. Maam Ndiakhate allait, avec les garçons, prier à la place se trouvant devant le marché Occas. Après la prière, et durant tout le reste de la journée, les gens se pardonnaient mutuellement les torts qu’ils avaient pu se causer durant l’année écoulée.

    - Dewénati !

    - Dewénati !

    - Pardonne-moi. Je te pardonne.

    - Je te pardonne aussi. Que Dieu nous pardonne !

    Chacun retournait chez lui pour immoler son bélier. Les enfants enlevaient leurs beaux habits pour ne les remettre que l’après-midi. Maam Marème faisait appel à son cousin Gora Niang qui, chaque année, égorgeait et dépeçait le mouton pour elle. Il venait avec ses deux fils qui l’aidaient à la tâche. Il faisait l’ablution rituelle de l’animal avant de le coucher sur le flanc, le cou au bord d’un trou fraîchement creusé. Maam Marème, se tenant derrière lui, posait sa main sur son dos, pendant qu’il égorgeait le bélier dont ses fils tenaient fermement les pattes. Il fallait un couteau bien tranchant pour éviter de faire souffrir inutilement l’animal. Dans toutes les familles, on allumait des fourneaux pour griller de la viande. Maam Marème commençait par le foie dont elle donnait une bonne part à Maam Ndiakhate, puis les côtelettes. Ce jour-là, les boucheries fermaient. Toute la ville embaumait de fortes odeurs de grillades. Maam Marème faisait des fritures de pommes de terre dont les gamins raffolaient. Elle cuisinait une sauce avec beaucoup de viande, bien entendu, et préparait une salade de laitue et de betterave. Le repas était prêt vers quinze heures. Entre temps, des enfants arrivaient, apportant des plats que leurs mères donnaient à Maam Marème. De chaque famille partaient des plats que l’on livrait à d’autres. Les enfants se battaient presque pour prendre le plat destiné à Maam Marème, car celui qui le lui remettait, était sûr d’empocher de l’argent ou de précieux cadeaux. Elle recevait tellement de plats qu’elle invitait des mendiants qui, au fil des années, venaient d’eux-mêmes, attendre leur dû. Elle leur donnait aussi une partie de la viande de son bélier et faisait sécher le reste, après l’avoir bouilli et salé, pour le conserver plus longtemps.

    Elle avait coutume de raser les garçons et d’aider les filles à s’habiller. Les enfants, dans leurs habits neufs, sortaient par petits groupes, rendre visite aux parents et voisins. On leur donnait des pièces de monnaie qu’ils comptaient à la fin de leur parcours et se partageaient. Les adultes aussi se rendaient mutuellement visite pour partager les bienfaits de ce jour béni, se pardonner leurs torts et formuler leurs meilleurs vœux.

    La korité, Aïd el fitr en arabe, est la fête qui marque la fin du mois de ramadan. Tout se passait comme pour la tabaski, sauf que l’on n’avait pas à égorger un bélier.

    Le tamkharit, par contre, est tout autre. Il correspond au dixième jour de l'hégire qui marque l'arrivée du prophète Muhammad à Médine. Certaines communautés musulmanes considèrent cette date comme jour à célébrer. On dit aussi que c’est le jour où Dieu avait pardonné à Adam, le jour où l’arche de Noé s’était immobilisée sur la montagne, le jour où Moïse avait fendu la mer, le jour où Jésus était né, le jour où Jonas était sorti des entrailles du poisson, le jour où Joseph était sorti du puits, le jour où Abraham était sauvé du feu, le jour de l’Ascension du Christ, le jour où Dieu avait accordé à David la rédemption de tout ce qu’il avait commis, le jour où Hussein, petit-fils du prophète Muhammad, était tombé martyr à Karbala, en Irak. Mais, il se peut bien qu’il coïncide avec une fête traditionnelle sénégalaise. Il est recommandé de préparer, la veille, un repas copieux et succulent. On dit que nul ne doit avoir faim cette nuit-là. D’aucuns précisent qu’il faut manger jusqu’à ne plus avoir de place dans son estomac. Les femmes préparaient un couscous de mil, le plus délicieux couscous de l’année. C’était avec une sauce à la viande dans laquelle on mettait quelques morceaux du bélier de tabaski que l’on avait séchés et conservés. Quiconque marchait dans les rues, pouvait humer les odeurs exquises qui se dégageaient des cuisines. Le crépuscule tombant, Maam Marème envoyait les enfants acheter du lait chez les bergers peuls qui trayaient leurs vaches devant eux. Sur le chemin du retour, ils en buvaient quelques irrésistibles gorgées. Ce lait était une autre sauce pour le couscous.

    Après le dîner, Maam Marème demandait aux enfants, qui ne se faisaient pas prier, de l’aider à faire un amoncellement de sable. Elle essuyait le bol dans lequel ils avaient mangé, et le retournait dessus. Il fallait se mettre face à la Kaaba, c’est-à-dire face à l’est, s’accroupir pour soulever le bol, le maintenir au-dessus du tas de sable, formuler quelques prières à voix basse, et le laisser tomber. Cela faisait « Pouf ! » On le reprenait encore, formulait d’autres prières, le lâchait encore et encore, autant de fois que l’on voulait. On allait du plus âgé au plus jeune, à chacun son tour. Puis, Maam Marème posait sur le bol renversé sur le tas de sable, un peu de couscous et de la viande que les chats venaient manger la nuit. Ensuite, les enfants se déguisaient et sortaient faire le « taajaboon », une sorte de carnaval. Les garçons s’habillaient en fille, les filles en garçon. Ils se mettaient en petits groupes, prenaient des ustensiles de cuisine sur lesquels ils tapaient et allaient de maison en maison pour chanter et danser. C’était la même chanson qu’ils chantaient tous, et ce dans toutes villes du pays. « Taajaboon, walaay, sama taaj bi, walaay, Abdu Jambaar, walaay… » Ils recevaient de l’argent et des cadeaux qu’ils se partageaient avant d’aller au lit. Pour Maam Marème et Maam Ndiakhate, commençait une nuit de prière et de recueillement.

    Le lendemain, la vieille femme retournait le bol dans lequel elle mettait de l’eau, une bague en argent et une pierre noire appelée « pierre de la foudre ». Les enfants se débarbouillaient avec cette eau, puis elle leur appliquait, sur les paupières, une poudre appelée tusngël. « Cela écarte la cécité », disait-on. Ils attendaient avec impatience le lever du soleil, pour assister à la lessive de Fatima, la fille du Prophète. Ils regardaient l’astre et y voyaient Fatima faisant sa lessive. Ils apercevaient toutes les actions qu’elle faisait et les vêtements de couleurs différentes qu’elle lavait. « Elle a pris un pagne jaune », disait quelqu’un. « Oui, je la vois », disait un autre. « Tenez, elle va accrocher le linge ! »… Ils restaient à regarder le soleil jusqu’à la fin, quand Fatima versait l’eau de la lessive et rentrait chez elle.

    (A suivre)
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Tyf 2007-06-11, 11:55

    Merci de nous divertir mais en plus de nous rappeller de bons souvenirs.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-11, 12:10

    Merci à toi, Tyf.
    Il me semble qu'il n'y a que Nemam et toi qui lisez mes conneries.
    En effet, que de souvenirs !
    Je poste la suite ?
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Tyf 2007-06-11, 12:13

    Ok je suis prête pour la suite. Dis-toi que ce ne sont pas des conneries mais des souvenirs d'enfance. Merci
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-11, 12:32

    MAAM MAREME (suite)

    Avec le temps, Sakhéwar grandissait, et Maam Marème dépérissait. La vieille femme tentait de maintenir ses habitudes, que son corps avait de plus en plus du mal à supporter. Depuis quelques années, elle avait légué son restaurant à Bigué Ndiaye, une des femmes qu'elle avait élevées. Elle possédait désormais une petite boutique à la maison. « Boutique », c'est sans doute trop dire, car ce n'était qu'une table sur laquelle elle posait un panier de cola, quelques bonbons et deux ou trois sortes de fruits. Ce commerce ne lui rapportait pas des tonnes d'argent ; c'était juste un moyen, pour elle, de s'occuper et de rester en contact avec son entourage. Sa devise était : « Prière, Famille, Travail. »

    Elle se réveillait toujours au milieu de la nuit. Elle chassait le sommeil et se levait pour prier. Bien avant le chant du coq, alors que tout dormait, elle se tirait de son lit, allait faire ses ablutions, étalait son tapis de prière au milieu de sa chambre et s'inclinait devant son Seigneur. Elle priait pour le pardon de ses péchés, pour son accès au paradis, pour une protection contre Satan et ses suppôts, pour que Dieu lui accorde une mort paisible. Avant, elle priait aussi pour une bonne santé et une longue vie. Toutes les prières qu'elle formulait pour elle-même, elle les formulait aussi pour toute l’humanité. Souvent, elle priait pour un tel ou pour une telle, nommément.

    Cette nuit, elle ne se levait pas seulement pour prier. C’était une nuit spéciale. La veille, à la tombée du jour, on avait « vu la lune ». A cette époque de l'année, peu avant le crépuscule, tout le monde sortait et scrutait le ciel. Petits et grands promenaient leurs yeux dans tous les sens. Une lune ne se montrant pas toujours au même endroit et n'ayant pas la clarté du soleil, ne vit que vingt-neuf ou trente jours, mais on ne savait pas d'avance sa longévité. Il fallait voir la nouvelle lune pour savoir que l'ancienne n’était plus. Si, au vingt-neuvième jour, on n’assistait pas à une naissance, on savait que c'était pour le lendemain. Chacun inspectait tout le bas de la partie occidentale du ciel. Soudain, quelqu'un criait :

    - La voilà !

    - Où ?

    - Là, entre le tamarinier et le baobab, un peu au-dessus de cette branche qui ressemble à une houe !

    Les gens se rapprochaient, s'amassaient, fixaient l'azur, puis disaient, l'un après l'autre :

    - Oui, je la vois !

    - Où est-elle ?

    - Là ! Suis mon doigt...

    La lune était mince comme un bout d'ongle que l'on vient de couper. Les enfants se disputaient le titre de celui qui l'avait vue le premier.

    Maam Marème trouvait des ressemblances entre elle et la lune qui ne cesse de vieillir. Naître, grandir, vieillir et mourir. Parfois, elle se disait que les lunes ne meurent pas, puisqu'elles reviennent chaque année. Elles devaient vivre en famille, comme des sœurs qui nous rendent visite à tour de rôle. Ne parlait-on pas de la sœur de la lune du Gammu ?

    Maam Marème n'allait plus guetter la lune, sa vue ayant considérablement baissé. Par contre, elle n'avait rien d'une sourde. Elle avait entendu les gens dire qu'ils avaient vu la lune. Elle l'avait aussi entendu à la radio, peu de temps après. Et Maam Ndiakhate, en rentrant, il lui avait dit : « Les habitants de Touba vont jeûner demain. » On venait de voir la lune du ramadan.

    Toujours allongée sur son lit, Maam Marème écoutait les bruits, comme elle avait coutume de le faire chaque nuit. Ces bruits étaient presque toujours les mêmes. Le petit Sakhéwar qui parlait dans son sommeil, Maam Ndiakhate qui toussait, un grillon qui chantait, les poules qui bougeaient derrière sa chambre, des moutons qui remuaient dans un enclos, des chiens qui aboyaient au loin, dans les champs ou à l'autre bout du quartier, les grelots d'un cheval que son maître avait négligé ou oublié de déharnacher, le froufrou du vent dans les arbres, le hululement d'un hibou ou d'autres bruits qu'elle n'arrivait pas à identifier, mais qu'elle entendait toutes les nuits. Parfois, elle avait peur, non pas de ces bruits, mais de ce qu'ils l'empêchaient d'écouter : les pas feutrés de la mort qu'elle sentait rôder autour de sa demeure. Depuis quelques années, la mort était devenue sa principale préoccupation. Elle savait que son rendez-vous avec l'ange était proche et, sans se l'avouer, elle avait peur d'être prise au dépourvu. On dit que l'heure est fixée bien avant la naissance et que nul ne peut ni l'avancer ni la retarder d'une seconde. Esrael, l’ange qui est chargé de cette mission, accomplit son devoir sans faute. Maam Marème connaissait l'histoire de cet homme qui se trouvait un jour chez le prophète Salamon, ne sachant pas ce qui l’attendait. L’ange de la mort, passant par-là, fut si étonné de le voir à cet endroit, qu'il s’arrêta et le regarda d'une certaine manière. L'homme, effrayé, dit à Salamon : « Je t'en prie, ordonne au vent de m'emmener à l'autre bout monde. » Une fois l'homme parti avec le vent, en quelques fractions de secondes, à l’autre bout du monde, Salamon demanda à l'ange :

    - Pourquoi l'as-tu regardé ainsi et lui as fait si peur ?

    - J’ai été étonné de le trouver ici, ayant reçu l'ordre de prendre son âme, dans une minute, à l'autre bout du monde.

    Maam Marème sentait qu'elle allait bientôt mourir, mais elle ne savait ni quand, ni où, ni comment. On racontait que l'enlèvement de l'âme du corps ressemble à retirer du coton de quelques broussailles épineuses. Elle se disait que si Dieu le voulait ainsi, elle devait l'accepter. Tout ce qu'elle souhaitait, c'était d'être enterrée dans la ville sainte de Touba.

    Elle chercha son chapelet à tâtons. Il était toujours à portée de main. Elle le prit et récita quelques litanies. Elle s'assit ensuite sur son lit, formula quelques prières, postillonna à sa droite, puis à sa gauche, avant d’allumer une bougie. Lorsqu’elle marchait, ses pas traînaient, ses jambes étaient lourdes, ses articulations craquaient. La vieillesse et la maladie, préludes de la mort, préparent l'âme à sa délivrance qui consiste à quitter le corps. Dans cette souffrance physique, l'esprit bien dirigé se fortifie.

    Sakhéwar dormait dans l'autre lit. Elle s’approcha de lui, comme pour vérifier qu’Esrael ne l'avait pas fauché au cours de son sommeil. Elle contempla cette âme dans ce corps si jeune, ce garçon au caractère si particulier. « Mon Dieu, dit-elle, pardonne-moi si j'ai mal élevé cet enfant, et pardonne à ses parents le péché qu'ils ont commis ! » Elle souhaitait avant sa mort, réconcilier Birima avec son père.
    (A suivre)


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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Tyf 2007-06-11, 12:48

    La suite Man Nit Ki!
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-11, 13:07

    MAAM MAREME (Suite et "fin")

    Elle alla ouvrir la porte de sa chambre. La « clef » devenait de plus en plus lourde. C'était un long morceau de bois accroché au battant par une corde attachée au milieu, qu'elle mettait à l'horizontale pour fermer, à la verticale pour ouvrir. Avant de sortir, elle versa un peu d'eau par terre, devant la porte, un rituel qu’elle accomplissait depuis son enfance. Dehors, il faisait noir. Elle n'avait pas peur de l'obscurité. De toute façon, elle était presque aveugle. Elle croyait à l'existence des esprits, des djinns, de toutes les créatures qui circulent la nuit, mais elle ne les craignait pas. Les djinns sont des êtres que le Seigneur a créés d'une flamme de feu sans fumée. Parmi eux, il y a des croyants qui suivent les commandements divins et des rebelles qui suivent les démons. On racontait de terribles histoires sur eux, mais Maam Marème ne craignait que Dieu. Dieu est le plus grand, se disait-elle. Il est le Seigneur des mondes. Aucun mal ne peut m'atteindre s'Il ne me l'a pas destiné.

    Elle se racla bruyamment la gorge pour voir si Maam Ndiakhate était éveillé. Le signal fut perçu. Le vieil homme, dans sa chambre, émit le même son. Lui aussi, il dormait peu. Maam Marème ramassa quelques brindilles et des papiers pour allumer son fourneau sur lequel elle mit du kinkéliba à chauffer. Elle alla ensuite aux toilettes, fit ses ablutions et retourna dans sa chambre pour prier.

    Deux heures plus tard, elle entendit la voix de Ndongo Fall qui parcourait le quartier en criant : « C'est l'heure de se préparer ! Levez-vous pour vous préparer ! »

    Maam Ndiakhate ouvrit sa porte.

    - Marème !

    « Hum ! » fit la « grand-mère de tous », en guise de réponse. Elle priait toujours et ne pouvait pas interrompre ses versets par d'autres paroles.

    - C'est l'heure de manger le xadd, continua Maam Ndiakhate, comme s'il se parlait à lui-même.

    Le xadd est le repas que les musulmans prennent à l'aube, avant de commencer un jour de jeûne.

    Maam Marème ne faisait plus la cuisine. Bigué Ndiaye lui apportait tous les repas dont elle, Maam Ndiakhate et Sakhéwar avaient besoin. La veille, elle lui avait donné du couscous Taalaale pour son xadd.

    Elle sortit de sa chambre. Maam Ndiakhate se trouvait dans la cour, assis sur une bûche, tout près du fourneau, un chapelet à la main. Il avait sorti sa lampe à pétrole. Elle le salua :

    - Léye.

    - Fall, répondit-il.

    Elle étala une natte par terre, servit le kinkéliba et mit la sauce du couscous à réchauffer. Cette sauce se composait habituellement de pâte d'arachide avec des haricots, du manioc et du poisson séché. Cette fois, il y avait de la viande, disons des tripes, pour être plus précis. Maam Marème était friande de viande, mais, édentée, elle se contentait de la sucer comme un bonbon, puis la crachait par terre, pour les chats.

    Un matou s'approchait déjà. On disait que parmi les jours du ramadan, un seul est recherché, car il équivaut à tout le mois, mais il n'est connu que des chats qui jeûnent alors. Ne pouvant ni le confirmer ni l'infirmer, Maam Marème préférait y croire jusqu'à preuve du contraire. Ce jour-là pourtant, les chats allaient manger, et elle allait jeûner.

    Assise sur la natte, à côté de Maam Ndiakhate qui restait silencieux, elle pensait à la journée qui l'attendait. La faim, la soif et surtout l'envie de croquer de la noix de cola. Elle tata un nœud de son pagne pour vérifier que la noix offerte, la veille, par une nièce y était toujours. C’était sa drogue. Elle avait des maux de tête quand elle restait longtemps sans en prendre.

    La sauce commença à bouillonner. Elle servit. Avant de prendre son repas, elle en versait toujours un peu par terre, pour les ancêtres. Cela n'est pas dans l'islam, pas plus que l'autel qu'elle avait dans un coin de la maison et où elle versait du lait caillé de temps en temps. Il en était de même pour les grigris qui couvraient son corps. C'étaient des pratiques héréditaires, plutôt animistes, que l’Islam n’arrivait pas à éradiquer.

    Elle mangea avec Maam Ndiakhate, puis ils partagèrent une noix de cola. Maam Marème avait râpé sa part avec un petit couvercle métallique parsemé de petits trous. C’était Sakhéwar qui avait percé ces trous avec un clou et une pierre servant de marteau. Peu après, la voix du muezzin déchira la nuit. A partir de ce moment, jusqu'au crépuscule, on ne devait plus manger ni boire ni même avaler beaucoup de salive d'un coup. Maam Marème cracha les miettes de cola qu'elle avait gardées sous sa langue et se rinça la bouche. L'épreuve commençait. Elle pressentait que la journée allait être rude, surtout avec l'harmattan qui balayait le Baol depuis quelques semaines. Maam Ndiakhate dirigea la première prière canonique de la journée, et chacun retourna dans sa chambre.

    Maam Marème alluma son vieux transistor enveloppé de cordons qui retenaient les parties détachées. Elle écouta avec recueillement des versets du Coran qu'une belle voix masculine psalmodiait. Elle ne comprenait pas le sens littéral des mots qu’elle sentait pourtant toucher son cœur. « Allahou akbar », répétait-elle de temps en temps. Elle avait pris soin de ne pas mettre le volume trop fort, de peur de réveiller le petit Sakhéwar. Elle laissait son poste allumé toute la journée. Elle écoutait tout, même les émissions en français ou en d'autres langues nationales, alors qu’elle ne parlait et ne comprenait que le wolof. Après les enfants, la radio était sa plus précieuse compagnie. Elle était ravie chaque fois qu'on lui offrait des batteries neuves.

    Il y eut quelques émissions en français suivies des avis de décès en wolof. Elle ne ratait jamais les avis de décès. Elle écoutait tous les bulletins, celui du matin, celui du midi et celui du soir. La voix de Djibril Fall disait : « Un tel habitant telle ville, un tel habitant telle ville, un tel fils du défunt, un tel, etc., ont la douleur de vous annoncer le décès d'un tel, habitant telle ville, décès survenu dans telle ville, tel jour. Le défunt était âgé de tant d'années... » Quand c'était quelqu'un qu'elle connaissait, Maam Marème s'écriait : « Ô mon Dieu, il était pourtant si jeune ! Que Dieu ait pitié de son âme et ne nous rappelle pas en hâte ! » C'était une formule qu'elle utilisait depuis son enfance. Mais au fond, elle ne souhaitait pas avancer dans la sénilité jusqu'à devenir un légume, un corps incapable et encombrant, à la charge d’autrui, un corps que l'on soulève et traîne partout, un corps que d'autres mains lavent et entretiennent, un corps que l'on étale le matin au soleil, telle une vieille natte humide que l'on aère. Au fil des années, elle avait entendu la voix de Djibril Fall nommer tous ceux de sa génération. Elle se demandait à présent quand son heure allait sonner.

    Le soleil avait coloré l'espace d'une lumière orange. Sakhéwar quitta son lit et sortit de la chambre, l'air mécontent. Il avait fait le naafila, la prière que l'on effectue la veille d'un jour de jeûne, et Maam Marème avait promis de le réveiller à l'heure du xadd.

    - Maam, dit-il, pourquoi ne m'as-tu pas réveillé pour le xadd ?

    - Ton xadd est encore chaud. Mange avant qu'il ne soit trop tard.

    - Pourquoi ne m'as-tu pas réveillé ?

    - Le xadd des enfants se prend à cette heure-ci. Vite ! Dépêche-toi ! Débarbouille-toi en vitesse. Tiens, prends ce pot, il y a de l'eau dedans.

    Sakhéwar s'exécuta. Il avait foi en sa « grand-mère ».

    Maam Marème ne se demandait pas si c'était un péché de mentir aux enfants. On avait l’habitude de lui mentir quand elle était petite, et elle le faisait à son tour. Les enfants ne peuvent pas et ne doivent pas tout savoir, disait-elle. A quoi bon leur apprendre ce dont ils n'ont pas besoin et qui risque de leur compliquer prématurément la vie ?

    L'enfant finit de manger. La grand-mère lui dit qu'il devait prier avec elle. Cette prière de la journée n'est pas obligatoire, mais Maam Marème ne la ratait jamais. Sakhéwar fit ses ablutions sous la direction de la vieille femme, puis se mit debout à côté d'elle, sur la natte, pour exécuter le rite, avec autant de solennité que possible. Il prenait son jeûne au sérieux.

    Les articulations de la vieille femme craquaient, pendant qu'elle se courbait, s'agenouillait, se prosternait, s'asseyait, se relevait. Elle avait mal partout. Elle savait que vu son âge et son état de santé, elle pouvait prier assise, mais elle tenait à pousser son corps jusqu'à ses limites. Au service de son créateur, elle ne trouvait rien excessif. La prière achevée, elle tourna la tête à droite, puis à gauche, disant à chaque fois : « Assalamou aleikoum ». L'enfant fit de même, puis s'empressa de sortir de la maison pour aller dire à ses copains qu'il jeûnait. « Je vais jouer », cria-t-il en courant vers la rue.

    Maam Marème prit son chapelet et se mit à murmurer des litanies.

    Deux heures plus tard, Sakhéwar était de retour. Il s'était tellement amusé avec ses camarades qu'il était tout éreinté. Il avait soif.

    - Grand-mère, dit-il, est-ce que je peux boire un peu d'eau ?

    - Oui, bien sûr. Les enfants, dans leur jeûne, ont le droit de boire un peu d'eau, de temps en temps.

    Sakhéwar se dirigea tout joyeux vers le canari se trouvant dans la chambre.

    « Mais juste un tout petit peu », ajouta la vieille femme sans se retourner.

    « D'accord ! » fit l'enfant. Il but à son aise. Il revint auprès de sa grand-mère, se coucha sur la natte et posa sa tête sur les cuisses presque centenaires, disant qu'il était fatigué. Elle lui caressa les cheveux et lui donna quelques biscuits, expliquant que les biscuits ne rompent pas le jeûne des enfants. Peu de temps après, il retourna jouer dans la rue. Elle reprit son chapelet.

    Sakhéwar revint un peu plus tard. Il avait faim. Maam Marème lui donna une datte et lui dit d'aller manger chez Bigué Ndiaye.

    Tous les enfants qu'elle avait élevés, jeûnaient de la même manière. Ils prenaient leur xadd à leur réveil, quelle que fût l'heure, puis ils allaient jouer avec leurs camarades du quartier qui « jeûnaient » aussi. Ils revenaient vers midi, épuisés, assoiffés et affamés. Elle leur donnait une datte « pour rompre le jeûne » et leur disait d'aller manger chez les voisins, en précisant que le jeûne des enfants s'arrête à midi. Au fil des jours, ils s'asseyaient près d'elle, au crépuscule, comptant avec leurs doigts et leurs orteils.

    - Grand-mère, j'ai jeûné tant de jours.

    - C'est très bien ! les complimentait-elle.

    Ce jour-là, Sakhéwar revint de chez Bigué Ndiaye, tout fier de lui. Maam Marème était allongée à l'ombre du manguier où elle s'était assoupie peu de temps auparavant.

    - Maam, dit le garçon, j'ai jeûné une journée.

    Maam Marème ne répondit pas.

    - Maam ! reprit Sakhèwar en la secouant par l'épaule.

    Maam Marème ne répondit pas.

    - Maam, combien de jours reste-t-il encore à jeûner ?

    Maam Marème n'allait plus jamais répondre.

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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Tyf 2007-06-11, 13:32

    Chaque mot que je lisais et qui m'approchait de la fin du récit faisait battre mon coeur car je présentais la fin. C'est vraiment triste surtout pour le petit sakhéwar. Bravo beau récit!
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-06-11, 14:11

    waw c'est beau on s'attendait à la fin mais ça n'empêche pas d'être triste. Moi je croyais que Maam maréme accomplirait sa derniére mission : réconcilier Birima et son pére mais elle a pas eu le temps. je pense à Sakhéwar qui s'était habitué à sa grang-mère.

    Mant Nit Ki ce qui me passionne dans tes récits ce sont les détails tu vas au fond des choses et tu nous relate tout Bravo c'est vriment impressionnant.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Sita 2007-06-12, 04:55

    c'est beau mais triste , surtout pour le petit sakhéwar, mame dafa nékh !
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-12, 16:38

    Merci les filles. Oui, c'est triste. Mais comme dit Sakhéwar, à qui n'a pas eu de grand-mère, il a manqué un quart de sa famille.


    LE PARRICIDE. The French Review, mai 2007

    THIAM, BATHIE NGOYE. Le Parricide. Paris. L’Harmattan, 2005. ISBN : 2-7475-8546-8

    Pp. 200. 17,50 €

    Le roman s’articule autour de Sakhéwar (le protagoniste), Maam Marème (sa grand-mère), Dibor (sa mère) et Birima (son père). Issu d’une relation interethnique hors mariage, Sakhéwar a été élevé par sa grand-tante (qu’il appelle, selon la coutume, grand-mère), une femme stérile dont les vertus étaient reconnues de tous. Malgré sa stérilité, elle est morte heureuse, digne et respectée. Le fait qu’elle soit morte paisiblement pendant qu’elle jeûnait illustre le caractère exceptionnel de cette femme. Pour beaucoup de Sénégalais, seuls « les amis de Dieu » meurent de cette façon. Cette croyance est symbolisée par la phrase wolof « Yalla nañu Yalla may mujj gu rafet » (littéralement : « Que Dieu nous offre une belle fin ») qui figure souvent dans les prières des Sénégalais.

    Thiam aborde les tabous qui persistent dans le monde rural vis-à-vis des relations amoureuses interethniques à travers Dibor et Birima dont le « crime » est d’avoir eu un enfant hors mariage. L’auteur contraste la décision des patriarches (le père de Dibor et celui de Birima) qui bannissent leurs propres enfants afin de sauvegarder l’honneur de leurs familles à l’attitude des mères qui continuent d’avoir beaucoup de sympathie et d’amour pour leurs enfants. Ce fait social est assez courant au Sénégal. A travers Sakhéwar et son père Birima, l’auteur examine également le problème de l’identité. Birima représente l’illettré rural qui se rend à Dakar (la grande ville) pour y travailler dans des conditions humiliantes chez un Français afin de nourrir sa famille. L’humiliation dont il est victime pose bien le problème du complexe d’infériorité issu de la colonisation que beaucoup de Sénégalais ruraux éprouvent. L’auteur utilise donc le personnage de Birima pour montrer que les séquelles de la colonisation restent ancrées dans certaines mentalités.

    Le personnage de Sakhéwar est opposé à celui de son père Birima. Élevé au village de Kouré, Sakhéwar y fréquente l’école primaire, où il passe ses meilleurs moments. Plus tard, il quitte le village pour se rendre à Dakar afin de poursuivre ses études. Après son arrivée dans la capitale, les illusions qu’il avait à propos de la ville se dissipent. Confronté à la dégradation des mœurs, à l’humiliation de son père, Sakhéwar se rebelle contre la société sénégalaise postcoloniale et tout ce qui représente l’Occident. Ainsi, il décide de devenir « un fier Africain »(131) qui refuse « d’être complice » (149) de l’assimilation culturelle occidentale. Il choisit, par exemple, de se vêtir de haillons plutôt que de porter des vêtements européens. Ces problèmes finissent par le rendre fou. Pour retrouver l’Afrique pure et idyllique de ses rêves, il retourne donc à Kouré. Une fois arrivé, il se rend compte que l’influence occidentale n’a pas épargné son village. Finalement, il participe tragiquement (avec son grand-père paternel) au meurtre de son père.

    Ce roman soulève plusieurs questions : les valeurs authentiques sénégalaises peuvent-elles survivre à l’assimilation culturelle occidentale ? Quel remède pour le complexe d’infériorité vis-à-vis de l’Occident qui gangrène la société ? Peut-on légiférer les relations amoureuses interethniques ? L’auteur pousse ainsi le lecteur à repenser les effets culturels, sociaux et mentaux de la colonisation.

    On trouve dans ce roman de nombreux « sénégalismes » : « yamba » (chanvre indien), « xeesal » (produit utilisé pour la dépigmentation), « fëgg jaay » (vêtements européens d’occasion vendus dans les marchés) et « visiter quelqu’un ». Ce sont là des aspects du français sénégalais qui sont naturellement colorés par le wolof. La richesse linguistique, la diversité des thèmes discutés et leur importance font de cette œuvre un travail à lire pour tous ceux qui s’intéressent à la société sénégalaise postcoloniale.

    Comme l’indique le nom de l’auteur – Bathie (d’origine wolof), Ngoye (d’origine sérère) et Thiam (nom de famille wolof) - il est lui-même probablement issu d’une famille interethnique. Sa connaissance des cultures sérère et wolof, sa maîtrise du français métropolitain aussi bien que sénégalais font de ce roman une œuvre littéraire sénégalaise exceptionnelle qui marquera sans doute les lecteurs.

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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-06-12, 17:01

    Je ne sais pas si j'y arriverai mais faudra que je trouve ce livre. Sakhéwar s'est-il senti trahi par son père pour vouloir sa mort? Apparemment faire face à la réalité n'a pas été facile pour lui ce qui a boulversé sa vie.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-12, 17:10

    Nemam, j'aimerais bien te l'envoyer, mais je n'en ai qu'un exemplaire en ce moment.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-12, 17:55

    Nouvelles fantastiques sénégalaises. The French Review, mai 2007

    THIAM, BATHIE NGOYE. Nouvelles fantastiques sénégalaises. Paris. L’harmattan, 2005.

    ISBN : 2-7475-8664-2. Pp. 175. 16 €

    This is a collection of twelve tales, the first six of which are recounted through the eyes of the author in a modern African world : the cultural context, however, belongs to the old one full of mystery, metamorphoses and other supernatural events. The tales are separate and individual, although some continue from one to another following a main character. Such is the case with Ndiogou, the hybrid of a djinn and a “rab”, who is “un esprit qui peut se présenter sous des formes animales ou humaines” (170), and who haunts his village at night. Ndiogou possesses superhuman strength and eventually kills the spirit which had haunted the soul of his mother. This liberation from supernatural spell brings her eternal peace. The reader will also encounter such beings as “deumes”, who are “des gens à l’apparence normale, mais qui sont dotés de pouvoirs surnaturels […] ils peuvent être nos voisins, nos collègues de bureau ou que sais-je encore »(50). However,

    « Quand un « deume » vous regarde, il voit l’intérieur de votre corps, vos organes et tout, d’où cet « œil long ». Mais, il ne fait pas que regarder. Il vous dévore à votre insu. Comment ? Là, on a l’embarras du choix. D’aucuns disent qu’il dévore votre âme, d’autres soutiennent qu’il grignote vos viscères, et d’autres encore affirment qu’il mange votre chair et vous remplis d’air, au fur et à mesure. » (51)

    Fortunately, there are individuals such as Kor Ndiaya who protect those who fear the “deumes” by selling them a “grigri” for a mere one hundred francs.

    In another entertaining tale, “La Vraie Deume”, a mother refuse to allow her son to marry Aïda who belongs to an inferior caste : “C’est même mieux d’épouser une Blanche de France ou une Peule du Niger qu’une femme de cette caste.” (73). The story ends tragically and the tables turn against the mother. Then there is the delightful “L’Ame soeur” in which Charles-Edouard Bourciez, a child of an interracial marriage, goes to Dakar, prepared with both a cell phone and condoms, and encounters a beautiful woman whom he pursues ; the phone plays an intriguing part in this story, not unlike those of Edgar Allen Poe. Other stories have a strong moral message such as in “L’arriviste” and “Le village des deumes”, the latter also presenting great depth and commentary on social injustices. The reader is also amusingly introduced to spirits called “moldes” who communicate by e-mail and in certain situations “où nul ne voulait céder, chaque “molde” s’amenait avec ses “sous-moldes”. C’était comme des milliers d’ordinateurs affichant le même programme. Il fallait alors trouver le serveur et modifier son disque dur. » (151)

    This collection of twelve entertaining and amusing tales from Senegal will enchant readers of all ages and could be easily integrated into intermediate language courses with a literary component. The language is clear, concrete, and rich with African references for the elucidation of our students and ourselves.

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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Nemie 2007-06-12, 17:58

    merci. ya t-il des chances qu'on le trouve dans les centres culturels français comme celui de st-louis
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Man Nit Ki 2007-06-12, 21:45

    Je ne sais pas, mais ils pouvent passer une commande.
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Sugar 2007-06-13, 04:27

    . je suis epoustouflée!!!!!trop fort!, je sais vraiment pas quoi dire.
    ces hsitoires sont devenues me drogue. merci pour ces purs moments de bonheur
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    Etudes Re: [NOUVELLE] Les Nouvelles fantastiques (Par: Man Dofbi)

    Message par Sugar 2007-06-13, 04:29

    je ferai tout pour trouver "le parricide"

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