Extraits du livre de Latif Coulibaly : Pape Ibrahima Diakhaté raconte les dernières minutes de l'assassinat de Me Sèye (Deuxième partie)
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Dans la seconde partie de ces extraits tirés du livre de Abdoulatif Coulibaly, Pape Ibrahima Diakhaté, un des assassins, détaille de manière précise comment, Me Babacar Sèye a été exécuté de sang froid. Il raconte les péripéties de cette fameuse journée du 15 mai 1993. Après leur forfait, ils (Diakhaté et ses acolytes) se rendent chez Wade pour lui rendre compte : « Nous lui avons expliqué le déroulement de l'opération dont il était le cerveau et le principal commanditaire ! Il nous a dit : c'est bien, soyez prudents », dit Diakhaté reprenant les propos de Me Wade.
Extraits du livre de Latif Coulibaly : Pape Ibrahima Diakhaté raconte les dernières minutes de l'assassinat de Me Sèye (Deuxième partie)
Nous sommes le 15 mai 1993, jour du drame. Les sénégalais discutent encore des résultats provisoire des élections législatives publiées la veille (.) Cette publication ayant ébranlé le Pds et ses ambitions, a joué comme une sorte de feu vert, pour décider de la mort du juge Sèye. Et c'est le moment précis de passer à l'action. Pape Ibrahima Diakhaté raconte :
« Le matin du 15, Clédor est venu me chercher chez moi. C'est lui qui conduisait la voiture. Ensemble, nous sommes allés voir Assane diop. Il se trouvait encore chez Ousmane Ngom. Ensuite, nous sommes partis ensemble voir Samuel Sarr. Quand nous l'avons vu, il nous a dit qu'il nous fallait une mitraillette pour bien réussir notre coup. Mitraillette, c'est ainsi que les civils nomment les armes à rafale. Il disait qu'il nous fallait une bonne arme à rafales. Il nous a dit qu'il connaissait quelqu'un qui en avait en sa possession. Celui qui devait nous trouver ces armes logeait à Bargny. Nous avons pas vu le gars et on a rebroussé chemin sur Dakar aux environs de 12 heures. Certains ont prétendu, je crois même que Clédor l'a dit lors de sa première audition que nous étions allés chercher des mangues dans un verger à Sébikotane, c'est faux, nous étions partis à la recherche de quelqu'un qui pouvait nous fournir une arme à rafales».
Après l'échec de la descente sur Bargny, Assane Diop prétend encore connaître une personne qui vit aux Hlm Las Palmas dans la banlieue de Dakar, dans les « montagnes » et qui pourrait leur procurer les armes automatiques. Cet homme là, soutient-il, est un ancien militaire qui a travaillé dans l'armurerie et qui fait un peu dans les trafics des armes. La bande se rend chez lui où elle a longuement discuté avec l'ancien militaire. Elle rentre pourtant à nouveau bredouille. Les jeunes décident alors de passer à l'action avec les armes dont ils disposent et dépit des limites qui leur ont été soulignées par certains de leurs mandants, comme le révèle ce témoignage :
« Nous avons failli renoncer momentanément à l'exécution en attendant, conformément aux implications de certains de nos mandats de trouver des armes à rafales. A notre retour, nous avons discuté entre nous et avons conclu que le Vieux nous prenait pour des menteurs parce que nous avions pris des engagements et qu'il y avait pas encore de résultats. Ousmane Sène dit « Tenace » était aussi dans le coup. Assane Diop n'était pas familier au Vieux. A quatre, nous nous sommes décidés et nous nous sommes dit : il ne faut pas qu'il nous prenne pour des menteurs, des trouillards ». Il nous avait trop mis la pression pour qu'on exécute l'affaire. Nous étions comme ses talibés. »
(.)
«Nous sommes partis chez Clédor Sène, nous sommes passés à Dieuppeul où nous n'avons pas vu la voiture de maître Sèye, nous avons alors mis le cap vers le conseil constitutionnel. Clédor avait en mémoire le numéro d'immatriculation. Arrivés à cet endroit, il a dit à Assane qui était assis devant à côté de lui : « vérifiez le numéro de la voiture ». En venant de Mermoz et en allant vers le conseil constitutionnel, celui qui est à côté du chauffeur a une meilleur vue. Assane Diop s'est exécuté et a dit : « Ohhh, oui ! Elle est là. » . Nous nous sommes alors garés un peu plus loin. Peu après, Youssou Ndiaye nous a dépassé. Il était dans sa voiture. Nous sommes allés faire le gué devant l'ambassade du Brésil : Je pense un journal l'avait écrit. C'était vrai, pendant que nous faisions le guet, j'ai eu un désaccord avec eux. C'est en ce moment que j'ai décidé de descendre vers la plage. Puis, je suis resté sur le rivage, mon pantalon était mouillé. Puis, je suis retourné à la voiture et nous sommes repartis au carrefour de l'université, on s'est arrêté quelques minutes après, la voiture nous a dépassé, nous l'avons reconnu et nous l'avons immédiatement suivi de près jusqu'au moment où il a tourné vers moi, j'avais un 75 et un 9 court. Un 9 millimètres court. C'est ce que j'avais. J'avais des balles artisanales dans mes deux pistolets »
Diakhaté se veut encore plus précis et qu'il détaillait dans ces explications :
« Quand j'ai tiré, l'une des deux armes s'est bloquée. Ce n'est pas pour me défendre, mais je peux aujourd'hui dire que ce sont les balles tirées du pistolet de notre camarade Assane Diop qui ont atteint maître Sèye. Je m'explique : les balles des 9 millimètres courts sont difficiles à trouver, je n'avais pas les bonnes balles, elles avaient été modifiées pour s'adapter à mon arme. Assane Diop s'était chargé de m'en trouver, il n'avait pas réussi et celles qui ont été chargées dans mon arme sont des balles pour un pistolet de 9 millimètres longues que nous avons adaptées pour un 9 mm court. C'est la personne que nous étions allé trouver aux Hlm Las Palmas qui avait fait sur les minutions un petit travail de modification. Pour ce faire, il avait pris la balle de 9mm longue dont il avait enlevé l'amorce pour d'abord couper la douille, et remettre ensuite le couvercle sur la douille. Cela ressemble alors à un 9mm long. Souvent quand on traficote une arme artisanale en coupant l'amorce, on perd beaucoup en fiabilité et en qualité de tir. De toutes les façons, l'arme s'était enrayée. Elle s'est coincée en dépassant la voiture, j'ai visé les pneus. Assane était devant, les gars disait « visez le chauffeur, visez le chauffeur ! ». Dans un premier temps, notre objectif était de leur faire peur. Nous voulions faire parler. Nous avons ensuite changé d'avis pour satisfaire le Vieux ».
On a beaucoup spéculé sur l'existence d'un témoin oculaire du meurtre de maître Babacar Seye qui roulait derrière les meurtriers, dans un véhicule tout terrain de couleur rouge. Ce témoin n'a jamais été retrouvé, ni lors de l'instruction, ni au moment du procès. Pape Ibrahima Diakhaté confirme pourtant son existence :
« Nous avions derrière nous un véhicule 4X4 de couleur rouge. Le chauffeur qui le conduisait nous a suivi jusque vers Liberté près du camp militaire. Quand nous avons remarqué sa présence, nous l'avons intimidé et il a immédiatement fait marche arrière. Il y avait à bord, un homme de type européen et une sénégalaise. Nous sommes allés à Liberté 6, puis à l'emplacement actuel du quartier de Sacré cœur 3 à côté de la Carrière, il n'y avait que peu de maisons à cet endroit en ce temps là. On s'est arrêté et avons remis la plaque d'immatriculation que nous avions enlevée. C'est à ce moment-là que nous avons réalisé ce que nous avions fait. »
Avaient-t-ils l'intention de tuer réellement ? Sûrement, Pape Ibrahima a un sentiment mitigé, même s'il pensait qu'il ne pouvait pas faire autrement, compte tenu de la forte pression qui était mise sur eux :
« Nous sommes allés jusqu'au bout du projet macabre pour démontrer au Vieux que nous n'étions pas des menteurs mais aussi pour lui prouver notre loyauté parce qu'il n'arrêtait pas de nous mettre la pression et disait entre les lignes que nous étions des poltrons. C'est la raison pour laquelle que nous y sommes allés. J'avais un désaccord avec mes gars. C'est la raison pour laquelle je parle aujourd'hui. Lui, je peux le jurer, nous avait confié la mission d'assassiner sans hésitation, ni murmure. En fait sa première cible était Youssou Ndiaye. C'est volontairement que nous ne l'avons pas atteint. »
(.)
Après le crime, les exécutants sont naturellement curieux de prendre connaissance de l'état d'esprit de ceux qu'ils désignent comme étant les commanditaire et pressés d'apprécier, en même temps, l'ambiance qui règnent chez eux. Ils décident d'aller les trouver, après avoir grignoté chez Mbaye Mbarick Fall. Pape Ibrahima Diakhaté se souvient :
« Nous avons pris un taxi. Le chauffeur sur notre demande, nous a débarqué juste derrière le domicile de l'épouse Wade. Aux abords de la maison, nous avons vu Lamine Faye, le petit neveu du Vieux qui est actuellement son garde du corps. Nous avons demandé alors au gardien qui était posté devant la maison d'éteindre la lampe qui est devant la porte dérobée de la concession pour qu'on puisse s'introduire en toute discrétion dans la maison. Assane Diop, lui, état déjà là. Dés que nous sommes arrivés, il est parti. Le vieux était dans sa cuisine. Je reviens un peu en arrière. Quand nous faisions le guet sur la corniche pour attendre le véhicule de maître Babacar Sèye, nous avons vu Famara Ibrahima Sagna, alors président du Conseil économique et social filant à toute allure sur le bitume, il a été reconnu par Clédor Sène et Assane Diop. Le soir, quand nous sommes arrivés chez le Vieux, il nous a informé que Famara Ibrahima Sagna était venu le voir »
Clédor et Diakhaté ont pu rencontrer Abdoulaye Wade et lui rendre compte :
« Quand nous sommes arrivés, le Vieux était assis dans le salon. Il semblait quelque peu préoccupé ou nerveux. En tous les cas, il était trop silencieux à mon avis normal, nous avions tué, mais nous portions ensemble le fardeau de la mort. Lui, sur sa vieille conscience de militant politique et nous, sur nos frêles consciences de jeunes manipulés. Il était incapable de nous fixer. Il avait la tête enfoncée dans les épaules et les yeux rivés sur la table qui était devant lui. Il était habillé d'un léger petit boubou sénégalais de couleur bleue »
Comment la rencontre s'est-elle passée ? Douze ans après, Pape Ibrahima Diakhaté se rappelle encore de celle-ci dans ses moindres détails.
« Nous lui avons expliqué le déroulement de l'opération dont il était le cerveau et le principal commanditaire ! Il nous a dit : c'est bien, soyez prudents ». En même temps, il nous a appris qu'il avait reçu une convocation de la gendarmerie. Il précisera cependant qu'il ne répondrait pas : « j'attendrai qu'on vienne me chercher ».
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Dans la seconde partie de ces extraits tirés du livre de Abdoulatif Coulibaly, Pape Ibrahima Diakhaté, un des assassins, détaille de manière précise comment, Me Babacar Sèye a été exécuté de sang froid. Il raconte les péripéties de cette fameuse journée du 15 mai 1993. Après leur forfait, ils (Diakhaté et ses acolytes) se rendent chez Wade pour lui rendre compte : « Nous lui avons expliqué le déroulement de l'opération dont il était le cerveau et le principal commanditaire ! Il nous a dit : c'est bien, soyez prudents », dit Diakhaté reprenant les propos de Me Wade.
Extraits du livre de Latif Coulibaly : Pape Ibrahima Diakhaté raconte les dernières minutes de l'assassinat de Me Sèye (Deuxième partie)
Nous sommes le 15 mai 1993, jour du drame. Les sénégalais discutent encore des résultats provisoire des élections législatives publiées la veille (.) Cette publication ayant ébranlé le Pds et ses ambitions, a joué comme une sorte de feu vert, pour décider de la mort du juge Sèye. Et c'est le moment précis de passer à l'action. Pape Ibrahima Diakhaté raconte :
« Le matin du 15, Clédor est venu me chercher chez moi. C'est lui qui conduisait la voiture. Ensemble, nous sommes allés voir Assane diop. Il se trouvait encore chez Ousmane Ngom. Ensuite, nous sommes partis ensemble voir Samuel Sarr. Quand nous l'avons vu, il nous a dit qu'il nous fallait une mitraillette pour bien réussir notre coup. Mitraillette, c'est ainsi que les civils nomment les armes à rafale. Il disait qu'il nous fallait une bonne arme à rafales. Il nous a dit qu'il connaissait quelqu'un qui en avait en sa possession. Celui qui devait nous trouver ces armes logeait à Bargny. Nous avons pas vu le gars et on a rebroussé chemin sur Dakar aux environs de 12 heures. Certains ont prétendu, je crois même que Clédor l'a dit lors de sa première audition que nous étions allés chercher des mangues dans un verger à Sébikotane, c'est faux, nous étions partis à la recherche de quelqu'un qui pouvait nous fournir une arme à rafales».
Après l'échec de la descente sur Bargny, Assane Diop prétend encore connaître une personne qui vit aux Hlm Las Palmas dans la banlieue de Dakar, dans les « montagnes » et qui pourrait leur procurer les armes automatiques. Cet homme là, soutient-il, est un ancien militaire qui a travaillé dans l'armurerie et qui fait un peu dans les trafics des armes. La bande se rend chez lui où elle a longuement discuté avec l'ancien militaire. Elle rentre pourtant à nouveau bredouille. Les jeunes décident alors de passer à l'action avec les armes dont ils disposent et dépit des limites qui leur ont été soulignées par certains de leurs mandants, comme le révèle ce témoignage :
« Nous avons failli renoncer momentanément à l'exécution en attendant, conformément aux implications de certains de nos mandats de trouver des armes à rafales. A notre retour, nous avons discuté entre nous et avons conclu que le Vieux nous prenait pour des menteurs parce que nous avions pris des engagements et qu'il y avait pas encore de résultats. Ousmane Sène dit « Tenace » était aussi dans le coup. Assane Diop n'était pas familier au Vieux. A quatre, nous nous sommes décidés et nous nous sommes dit : il ne faut pas qu'il nous prenne pour des menteurs, des trouillards ». Il nous avait trop mis la pression pour qu'on exécute l'affaire. Nous étions comme ses talibés. »
(.)
«Nous sommes partis chez Clédor Sène, nous sommes passés à Dieuppeul où nous n'avons pas vu la voiture de maître Sèye, nous avons alors mis le cap vers le conseil constitutionnel. Clédor avait en mémoire le numéro d'immatriculation. Arrivés à cet endroit, il a dit à Assane qui était assis devant à côté de lui : « vérifiez le numéro de la voiture ». En venant de Mermoz et en allant vers le conseil constitutionnel, celui qui est à côté du chauffeur a une meilleur vue. Assane Diop s'est exécuté et a dit : « Ohhh, oui ! Elle est là. » . Nous nous sommes alors garés un peu plus loin. Peu après, Youssou Ndiaye nous a dépassé. Il était dans sa voiture. Nous sommes allés faire le gué devant l'ambassade du Brésil : Je pense un journal l'avait écrit. C'était vrai, pendant que nous faisions le guet, j'ai eu un désaccord avec eux. C'est en ce moment que j'ai décidé de descendre vers la plage. Puis, je suis resté sur le rivage, mon pantalon était mouillé. Puis, je suis retourné à la voiture et nous sommes repartis au carrefour de l'université, on s'est arrêté quelques minutes après, la voiture nous a dépassé, nous l'avons reconnu et nous l'avons immédiatement suivi de près jusqu'au moment où il a tourné vers moi, j'avais un 75 et un 9 court. Un 9 millimètres court. C'est ce que j'avais. J'avais des balles artisanales dans mes deux pistolets »
Diakhaté se veut encore plus précis et qu'il détaillait dans ces explications :
« Quand j'ai tiré, l'une des deux armes s'est bloquée. Ce n'est pas pour me défendre, mais je peux aujourd'hui dire que ce sont les balles tirées du pistolet de notre camarade Assane Diop qui ont atteint maître Sèye. Je m'explique : les balles des 9 millimètres courts sont difficiles à trouver, je n'avais pas les bonnes balles, elles avaient été modifiées pour s'adapter à mon arme. Assane Diop s'était chargé de m'en trouver, il n'avait pas réussi et celles qui ont été chargées dans mon arme sont des balles pour un pistolet de 9 millimètres longues que nous avons adaptées pour un 9 mm court. C'est la personne que nous étions allé trouver aux Hlm Las Palmas qui avait fait sur les minutions un petit travail de modification. Pour ce faire, il avait pris la balle de 9mm longue dont il avait enlevé l'amorce pour d'abord couper la douille, et remettre ensuite le couvercle sur la douille. Cela ressemble alors à un 9mm long. Souvent quand on traficote une arme artisanale en coupant l'amorce, on perd beaucoup en fiabilité et en qualité de tir. De toutes les façons, l'arme s'était enrayée. Elle s'est coincée en dépassant la voiture, j'ai visé les pneus. Assane était devant, les gars disait « visez le chauffeur, visez le chauffeur ! ». Dans un premier temps, notre objectif était de leur faire peur. Nous voulions faire parler. Nous avons ensuite changé d'avis pour satisfaire le Vieux ».
On a beaucoup spéculé sur l'existence d'un témoin oculaire du meurtre de maître Babacar Seye qui roulait derrière les meurtriers, dans un véhicule tout terrain de couleur rouge. Ce témoin n'a jamais été retrouvé, ni lors de l'instruction, ni au moment du procès. Pape Ibrahima Diakhaté confirme pourtant son existence :
« Nous avions derrière nous un véhicule 4X4 de couleur rouge. Le chauffeur qui le conduisait nous a suivi jusque vers Liberté près du camp militaire. Quand nous avons remarqué sa présence, nous l'avons intimidé et il a immédiatement fait marche arrière. Il y avait à bord, un homme de type européen et une sénégalaise. Nous sommes allés à Liberté 6, puis à l'emplacement actuel du quartier de Sacré cœur 3 à côté de la Carrière, il n'y avait que peu de maisons à cet endroit en ce temps là. On s'est arrêté et avons remis la plaque d'immatriculation que nous avions enlevée. C'est à ce moment-là que nous avons réalisé ce que nous avions fait. »
Avaient-t-ils l'intention de tuer réellement ? Sûrement, Pape Ibrahima a un sentiment mitigé, même s'il pensait qu'il ne pouvait pas faire autrement, compte tenu de la forte pression qui était mise sur eux :
« Nous sommes allés jusqu'au bout du projet macabre pour démontrer au Vieux que nous n'étions pas des menteurs mais aussi pour lui prouver notre loyauté parce qu'il n'arrêtait pas de nous mettre la pression et disait entre les lignes que nous étions des poltrons. C'est la raison pour laquelle que nous y sommes allés. J'avais un désaccord avec mes gars. C'est la raison pour laquelle je parle aujourd'hui. Lui, je peux le jurer, nous avait confié la mission d'assassiner sans hésitation, ni murmure. En fait sa première cible était Youssou Ndiaye. C'est volontairement que nous ne l'avons pas atteint. »
(.)
Après le crime, les exécutants sont naturellement curieux de prendre connaissance de l'état d'esprit de ceux qu'ils désignent comme étant les commanditaire et pressés d'apprécier, en même temps, l'ambiance qui règnent chez eux. Ils décident d'aller les trouver, après avoir grignoté chez Mbaye Mbarick Fall. Pape Ibrahima Diakhaté se souvient :
« Nous avons pris un taxi. Le chauffeur sur notre demande, nous a débarqué juste derrière le domicile de l'épouse Wade. Aux abords de la maison, nous avons vu Lamine Faye, le petit neveu du Vieux qui est actuellement son garde du corps. Nous avons demandé alors au gardien qui était posté devant la maison d'éteindre la lampe qui est devant la porte dérobée de la concession pour qu'on puisse s'introduire en toute discrétion dans la maison. Assane Diop, lui, état déjà là. Dés que nous sommes arrivés, il est parti. Le vieux était dans sa cuisine. Je reviens un peu en arrière. Quand nous faisions le guet sur la corniche pour attendre le véhicule de maître Babacar Sèye, nous avons vu Famara Ibrahima Sagna, alors président du Conseil économique et social filant à toute allure sur le bitume, il a été reconnu par Clédor Sène et Assane Diop. Le soir, quand nous sommes arrivés chez le Vieux, il nous a informé que Famara Ibrahima Sagna était venu le voir »
Clédor et Diakhaté ont pu rencontrer Abdoulaye Wade et lui rendre compte :
« Quand nous sommes arrivés, le Vieux était assis dans le salon. Il semblait quelque peu préoccupé ou nerveux. En tous les cas, il était trop silencieux à mon avis normal, nous avions tué, mais nous portions ensemble le fardeau de la mort. Lui, sur sa vieille conscience de militant politique et nous, sur nos frêles consciences de jeunes manipulés. Il était incapable de nous fixer. Il avait la tête enfoncée dans les épaules et les yeux rivés sur la table qui était devant lui. Il était habillé d'un léger petit boubou sénégalais de couleur bleue »
Comment la rencontre s'est-elle passée ? Douze ans après, Pape Ibrahima Diakhaté se rappelle encore de celle-ci dans ses moindres détails.
« Nous lui avons expliqué le déroulement de l'opération dont il était le cerveau et le principal commanditaire ! Il nous a dit : c'est bien, soyez prudents ». En même temps, il nous a appris qu'il avait reçu une convocation de la gendarmerie. Il précisera cependant qu'il ne répondrait pas : « j'attendrai qu'on vienne me chercher ».