(Première Partie)
Chapitre 1 La belle vie
Assi, est heureuse, elle vient d’avoir son bac et une nouvelle vie s’ouvre à elle. Sur le chemin qui la mène à son lycée, elle sait qu’une étape à été franchie, elle se voit déjà étudiante à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. Babacar l’a appelé vers 14 H pour lui dire qu’elle a réussi au premier tour, n’empêche elle se dirige vers le lycée Abdoulaye Sadji parce qu’elle veut voir de ses propres yeux son nom : Aissatou BA (Assi), née le 12-10-1980 à Rufisque. Teunguedj, comme elle à l’habitude d’appeler sa ville adorée, sa ville natale, même si ses cousines de Dakar se moquaient de l’état d’insalubrité de sa ville ça ne la gênait aucunement car Rufisque fait partie de ses plus grandes richesses. Elle connait rio comme sa poche car elle a eu à déménager de nombreuses fois dans la même ville pour des raisons qu’elle ignorait parce qu’elle était trop jeune.
Aujourd’hui n’est pas un jour comme les autres, elle se sent pousser des ailes et elle est très fière de ses résultats scolaires, d’après ce que lui a dit Babacar elle était la cinquième sur la liste de son jury. Toutes ces années d’études viennent de payer, quelle bonheur pour elle. En y réfléchissant de plus prés elle a toujours réussi et eu de bonnes notes sans se fatiguer, c’était une sorte d’aisance à comprendre en classe, depuis la maternelle elle a toujours été parmi les cinq premiers de sa classe : du ruban rouge, au tableau d’honneur et félicitations des professeurs. Au fond d’elle, elle savait que si elle se donnait plus dans ses études, elle aurait de meilleurs résultats, mais elle faisait tout juste le nécessaire et pas plus et ça lui a toujours réussi. Elle se dit qu’il était temps qu’elle arrête de rêvasser, c’est la deuxième fois qu’un conducteur de calèche klaxonne pour lui demander de se mettre sur le trottoir. De toute façon le lycée n’est pas trop loin de la mairie de Rufisque et du commissariat, elle était presque arrivée. Elle savait que sa meilleure amie Yacine Ndiaye avait réussi parce que Babacar lui avait dit au téléphone, mais qu’en est –il des autres ? Deux secondes après cette pensée pour ses camarades de classes, elle aperçut Binta Gueye qui venait de déboucher de la ruelle faisant angle à la mairie. Elle était en pleur, accompagnée de deux élèves. Assi sentit ses jambes la lâcher devant l’évidence de l'echec de Binta qu’elle a connu cette année mais avec qui elle a passé de bons moments. Binta est une fille pleine de vie, ouverte et drôle, Assi l’aimait beaucoup et appréciait sa compagnie. Elle qui était habitué aux humeurs instables de Yacine, qui est une fille trop sérieuse.
Il lui fallut plus de dix secondes pour savoir qu’elle devait réagir à la souffrance et désespoir de son amie Binta. Elle s’élança vers elle, la serra dans ses bras pour la calmer, l’apaiser, mais les mots n’arrivait pas à sortir. Pendant plus de trois mois Binta a été sa compagne de révision, elle l’a amené dans toutes les salles d’écoles primaires disponibles le soir pour les révisions. C’est elle qui l’a présenté à Babacar qui faisait une série scientifique pour qu’il les aide en math, la bête noire des littéraires. Assi se disait qu’il fallait qu’elle dise quelque chose pour calmer Binta, mais à la place des paroles des larmes coulèrent sur ses joues. Et là, elle a compris que l’histoire du bac n’était pas si facile qu’elle le croyait et en prenant à droite sur la ruelle qui donne vers le lycée il faudra qu’elle gère ses émotions. Avec Binta elle n’a pas pu la consoler jusqu’à ce que Binta s’échappe de ses bras pour continuer sa route en pleurant. C’est la dernière image qu’elle aura d’elle pendant cette période, parce que les dés étaient jetés, les chemins tracés et chacun prendrait sa route avec son lot de bonheur et de malheur. A cet instant elle ne pouvait pas s’imaginer une seule seconde qu’elle reverrait Binta 10 ans plus tard comme infirmière dans une clinique lors de l’opération de la mère d’Assi. Binta passerait des heures à la réconforter et à lui redonner le moral pour qu’elle ait le courage de supporter les supplices de l’attente des heures interminables de l’opération.
Assi continua sa route, arrivée devant le lycée elle y trouva son amie Yacine, qui ne faisait apparaître aucune émotion sur les événements. elle gardait son calme, Yacine est opaque, elle s’est renfermé en elle depuis l’enfance et ça, Assi l’a compris depuis le temps qu’elles sont ensemble. Elles se connaissent depuis la maternelle et depuis elles se sont retrouvées dans les mêmes classes, c’est ainsi qu’elles sont devenues inséparables et complices malgré leurs différences de caractères. Assi était extravertie, naïve, elle avait gardé son insouciance d’enfant. Elle était la benjamine d’une famille de neuf enfants et était chouchoutée par sa famille, elle n’a jamais manqué de rien parce que son papa avait sa propre affaire qui était prospère. Elle a eu une enfance heureuse pleine de beaux souvenirs. Heureusement que son père en tant que a toujours veillé à ce qu’elle reçoive une éducation à l’ancienne avec beaucoup de respect pour les ainés et la pratique de la religion.
Assi avait hérité de la joie de vivre de son père et de la douceur et noblesse de cœur de sa mère que tout le monde appelé Yaye, que ça soit ses enfants, son mari, ses amies, et même les vieilles personnes. Cette femme a toujours dégagé un charisme extraordinaire. Sous ses airs calmes, tranquilles, elle en a intimidé plus d’un, mais sous son apparence de dame de fer ses yeux et son sourire au coin des lèvres dégageaient beaucoup d’amour. Yaye était une femme forte, pleine de bon sens, elle avait toujours de bons conseils et Assi se rappelle que de nombreuses personnes venaient la voir pour bénéficier de sa sagesse. Assi n’a jamais vu ni entendu sa maman se disputer, elle a toujours inspiré le respect parce qu’elle respectait et aimait tout le monde. Le plus grand rêve d'Assi était de ressembler à cette dame qui était son plus grand modèle.
Yacine quand à elle était introvertie, elle a construit très tôt une muraille en elle même. Assi trouvait son ami dur par moment, c’est par la suite qu’elle a su les raisons de Yacine dans une dissertation en classe de 3éme ou le professeur leurs avait demandé de relater les moments forts de leur vie. Et c’est là que yacine a décidé de parler de sa mère qu’elle n a jamais connu et qu’elle a rencontré à l’âge de 13 ans avec l’aide de son grand père parce que son père ne voulait plus entendre parler de cette femme qui a abandonné ses enfants en bas âges. Très tôt Yacine a du se battre pour survivre aux coups et méchancetés de ses belles-mères. Son père n’avait pas beaucoup de moyens et vivait avec son frère qui avait trois femmes et lui aussi en avait trois, ils vivaient tous ensemble avec leurs enfants et petits enfants dans une petite maison. Assi aimait beaucoup yacine et allait la voir souvent mais elle priait pour ne pas avoir une envie pressante. L’état des toilettes était lamentable pour ne pas dire qu’il n’y en avait pas concrètement tout juste une porte et derrière un trou d’usage. Yacine partageait une petite chambre avec trois personnes et la chambre n’avait pas de fenêtre, il y faisait une chaleur d’enfer surtout pendant l’hivernage. Mais Assi ne considérait plus Yacine comme une amie mais comme une sœur, elle n’a jamais fait de remarques désobligeantes, elle qui vivait dans une grande maison de 400m2 avec étage qui appartenait à son père. Ceci est du à l’éducation reçu de sa maman. Depuis qu’elle est petite Yaye lui a toujours appris que la vie est comme une boule et elle tourne. Elle se rappelle encore des phrases de Yaye : « garde toujours la simplicité de ton cœur, la vie a de longues jambes, aujourd’hui elle est au point A et demain au point Z, aujourd’hui tu es riche et demain tu es pauvre. On ne sait jamais de quoi l’avenir sera fait et ce qui est important dans une vie ce n’est pas les richesses de ce monde mais les gens et l’amour de ces gens car ils sont la plus grande richesse. On amènera rien après la mort que les bonnes actions, alors tout ce qui est matériel ne vaut pas la peine de vendre sa dignité. »
Yaye a toujours était sage dans ses paroles pace qu’elle en a vécu l’expérience. Très tôt, elle a perdu sa famille qui était assez riche et il a fallu qu’elle arrête ses études pour s’occuper de ses frères. Quand elle s’est marié avec le père de Assi, Tonton Issa, ils n’étaient pas pauvres ni riches, ils vivaient assez bien avec le peu qu’ils avaient. Quand il y a eu les enfants ça commençait à être difficile, Yaye a toujours aidé son Tonton Issa, en faisant de petits boulots de commerce : vendeuse de sandwich, fataya, bissap, eau…Quand elle a attendait mon grand frère Soulèye, elle a pensé que ça allait être plus dur pour gérer ses sept et un Huitième qui s’annonce. Elle est allée s’asseoir sur un banc pour pleurer ce coup du destin parce que c’était assez difficile avec Sept. Mais elle s’est vite ressaisie en pensant à toutes ces femmes qui n’arrivaient pas à avoir d’enfants. Elle s’est dit, Dieu Vous ne me donnerez jamais un fardeau que je ne pourrais porter. Deux ans plus tard elle attendait Assi, et elle est allée s’asseoir sur le même banc pour pleurer, quand elle s’est rappelée que deux ans auparavant elle avait fait pareil elle s’est mise à rire et voyait l’avenir sous des jours meilleurs. Ce qui fut le cas, Tonton Issa eu un bon travail et au bout de quelques années il put ouvrir sa propre entreprise parallèlement, il a construit une grande maison, acheté une voiture conduite par un chauffeur, il a acheté des terrains, et les enfants ont pu aller dans de bonnes écoles. Il faisait parti des hommes les plus riches et influents de la ville. La simplicité des Ba est restée ancré en eux même malgré ce pas géant de la vie.
Assi en regardant yacine compris que même si elle ne disait rien et ne laissait rien paraitre elle était heureuse, une nouvelle vie s’ouvrait à elle parce qu’elle rêvait de faire de longues études pour devenir un jour quelqu’un et aider son père et ses frères. Yacine et Assi se sont regardées longuement et dans leurs yeux on pouvait y lire que ce n’était que le début. Car Assi avait aussi les même rêves, car depuis l’ascension sociale de son père quand elle était enfant, de l’eau avait coulée sur les ponts et depuis la vie avait fait un autre pas géant qui s’appelait la retraite et la faillite des affaires avec leurs conséquences comme la vente de tous les biens matériels , heureusement il restait la maison qui était le témoin des jours glorieux. Elle a compris par la suite les paroles de sagesse de Yaye qui disait : « la vie a de longues jambes, aujourd’hui elle est au point A et demain au point Z », maintenant pour faire accepter à ses enfants la nouvelle réalité du moment, elle disait : « mon verre est petit mais je bois dans mon verre », ce qui signifiait qu’il fallait toujours se contenter de ce qu’on a. Cette parole a fait qu’Assi n’a jamais envié les autres, elle a toujours bu dans son verre. Elle aimait tellement la quantité que ça l’a toujours désaltéré et elle ne s’est jamais plainte de soif. Tout ce qu’elle voyait maintenant c’était le chemin du savoir, la prochaine étape où elle devra se préparer pour sa vie professionnelle.