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' Il n'y a pas de tête lucide entre deux termes d'un choix' Cette vérité sortie de la bouche de Samba Diallo cadre parfaitement avec la situation politique actuelle au Sénégal.
Non pas que nos choix politiques aient à se limiter entre Me ABdoulaye Wade et M.IDrissa Seck. Cependant un certain réalisme dans la lecture des événements politiques devrait nous amener à savoir que les prochaines joutes seront le théatre de ce duel, n'en déplaise les vieux routiers de la politique sénégalaise qui sont dans la Gauche par exemple.
Le plus terrible pour nous c'est que ce duel risque de s'offrir comme un drame, une tragédie: parce que nous aurons sans doute à nous prononcer sur deux personnes qui ont à peu près le même parcours politique, les mêmes références politico-philosophico--littéraires, les mêmes valeurs si ce n'est les mêmes principes. Me Abdoulaye Wade et Idrissa Seck partagent bel et bien leur goût du Pouvoir et de l' Avoir : il y a une imbrication entre les deux, surtout sous les tropiques. Quant au Savoir, l'un, Me Wade, a été à sa recherche, il en a acquis une bonne parcelle;l'autre, Idrissa Seck, maintient un certain flou voire une certaine mystification sur son parcours universitaire, après avoir dit explicitement des contre-vérités là-dessus.
Le Président de Rewmi a eu un compagnonnage ininterrompu de 30 ans avec Me Abdoulaye WAde, qui a été comme son Maître Penseur et celui qui l'a forgé politiquement, celui qui l'a créé de toutes pièces.
Doit-on se contenter de l'argument servi par Idrissa Seck dans son Cd 1, qaund il était en prison, selon lequel le ver était dans le fruit depuis le début du pouvoir issu de l' Alternance? Est-ce vraiment suffisant de dire que Me Wade a rompu le pacte entre eux ( quelles en sont les vrais termes ?) celui de ne jamais lui faire du mal ? Ce pacte ne consistait-il pas, ainsi que Idrissa Seck l'a presque reconnu à demi-mots, à faire de Wade le vainqueur des élections de 2000 et une fois que celui-ci aura assuré la transition il cède la main? Peut-on dire que c'est parce que Viviane Vert Wade a exigé de son époux qu'il choisisse leur fils Karim Ben Abdallah Wade pour parachever son travail que la rupture devait être consommée entre les deux hommes? Le Cd1 indique bien que M. Seck en a été informé dès 2000 !
Est-ce cela qui a commandé son attitude, décriée par les fidèles parmi les fidèles à Me Wade, qui consistait à tisser sa toile à l'intérieur du PDS et de l' Etat? Est-ce ce qui justifie qu'il n'ait pas pris en charge les projets mirobolants de Me Wade ? La réponse de IDy comme quoi il ne pouvait prendre de tels engagements parce que les préalables n' étaient pas assurés, à savoir le chronogramme, les études de faisabilité etc, cette réponse donc est juste a posterirori. Il aurait été plus courageux et plus honnête de la fournir lorsqu'il était en fonction.
Bref, ce sont là des questions qui nous taraudent l'esprit. Le comble c'est précisément l'issue du dossier des chantiers de Thiès.
Les conclusions qu'il faut en tirer sont de trois ordres :
- ou bien Idrissa Seck a effectivement détourné de l'argent, mais a eu l'intelligence de fausser les pistes, n'oublions pas qu'il était dans un cabinet d'audit. Il faudrait à ce moment se demander à quoi nous servent la Cour des Comptes, l' IGE, la Gendarmerie, la Police, les Experts Evaluateurs etc ?
-ou bien il n'a pas détourné de l'argent et donc son arrestation n'était qu'un prétexte pour le mette au gnouf ? En vue de quoi ? De le mettre hors d'état de nuire ? Ou d'essayer de le forcer à répondre de quelque chose ? Ou à rendre ce qui ne lui appartient pas?
-ou bien les chantiers de Thiès ne sont que rideau qui tentait de dissimuler un problème de gros sous entre Me Wade et Idrissa Seck. Ce dernier s'en est ouvert à Amath Dansokho lui-même, mais également à Oumar Sarr, son actuel porte parole.
La suite des évènements doit nous amener à conclure que le problème entre les deux hommes est bien celui de la gestion des fonds politiques. Cela seul doit permettre de comprendre qu'il n'y ait pas eu de suite dans l'audition des entrepreneurs, celle des Ministres concernés, des structures ayant pris part à ces travaux. Cela explique également qu'il ait été libéré malgré tout ce tintamarre, non pas sur la base de défaut de preuves compromettantes, mais sur la base de négociations initiées par Me Wade et ses émissaires.
Idrissa Seck vraisemblement n 'aurait pas respecté les termes de l'engagement issu de ces négocations. A contrario, il en fait une très bonne récupération politique : il précise que s'il avait détourné de l'argent dans les chantiers de Thiès, on ne l'aurait pas libéré.
Mais il ne s'est jamais prononcé sur les objets de ces négociations ! Précisément parce qu'il devait tirer profit de cette erreur politique de la part de son Maître ! Le mettre en prison sans l'exterminer politiquement, c'est-à-dire fournir des éléments compromettants à même de noircir définitivement son Cv, c'était justement participer par une dialectique à en faire un martyr et à construire l'aura politique de cet homme ambitieux, qui n'a donc pas fait mystère de son voeu de réaliser son destin présidentiel.
Il appartenait donc à M. Seck de tirer le plus grand bénéfice de cette gaffe : et ce par la magie de la reconstitution et du Discours !
Il fait un black out total sur l'objet des négociations, il reconnaît leur existence. Il ne nous dit pas ce que Me Wade lui a proposé, ce qu'il a accepté de faire, quels sont les engagements qu'il a pris auprès des émissaires de Me Wade, quels sont ceux de Me Wade auprès des émissaires de IDrissa Seck.
Mon hypothèse qui peut paraître simpliste est que devant cette tournure des choses : Me Wade, qui se voit adouber par le Jeune, se trouve dans une situation difficile : s'il dénonce Idrissa Seck de détournements d'objectifs, notamment d'avoir redirigé de l'argent prévu à d'autres fins, il s'agirait de centaines de milliards, alors Me Wade se trouverait dans la situation de celui qui faisait migrer des fonds politiques dont le contrôle est certes du seul ressort du Chef de l' Etat, c'est-à-dire qu'il en dispose comme il veut, mais des fonds politiques qui vont malheureusement largement au-delà de ce qui est autorisé par l' Assemblée Nationale. Car si la gestion des fonds politiques n'est sujette à aucun contrôle, son montant est voté publiquement par l'Assemblée Nationale: il serait de 650 Millions de francs CFA . Pourquoi donc est-il question de milliards ? Parce que des dons, des aides venant de puissances étrangères aurait été systématiquement versés sur le compte des fonds politiques, qui étaient du coup un trèsor de guerre pour Me Wade dans l'achat de certaines consciences. C'est ce trésor de guerre, ou en tout cas une bonne partie qui sera le levier financier de M Seck dans son combat pour la conquête du Pouvoir !
Si Me Wade le dénonce comme un Voleur, il serait lui-même accusé de vol ! Un voleur ne désigne pas un autre comme voleur. Ce qu'il pouvait faire c'était essayer d'entacher sa réputation avec les Chantiers de Thiès, mais cela a capoté. Le remettre en prison à 4 mois des élections serait une honte pour la démocratie sénégalaise. D'où la nécessité dans laquelle se trouvait Me Wade de proposer à nouveau des négociations, car elles ont bien existé et ont été initiées par BONGO Omar.
Si cette hypothèse est valable, en tout cas elle est plausible, on comprendrait alors qu'on ait du mal à choisir entre les deux hommes ! Ils seraient effectivement à mettre dans le même sac: tous les deux ne seraient intéressés que la recherche du profit, 'deux bandits de grand chemin', deux coupeurs de route en costumes, deux larrons forgés dans le même moule : celui de trouver les voies et moyens de satisfaire les appétits de leur EGO démesuré !
Il suffit de faire une petite analyse de leur profil psychologique pour voir qu'ils ont, sous différents rapports, tous les deux pareils : ils manient bien le Wolof, comprennent très bien le mental des sénégalais, en font cas surtout quand ils parlent wolof, ils savent comment leurrer les sénégalais, leur point fort, leur talon d'achille, leurs références sociétales, culturelles, religeuses. D'ailleurs quand on reproche à Idrissa Seck d' utiliser la religion à des fins politiques, on oublie toujours que Me Wade avait dit juste avant les élections de 1993 que celui qui dirigera le Sénégal est celui qui aura bien profondément compris l'impact de la Religion, entendez aussi le confrérisme religieux.
C'est pourquoi justement l'on a du mal avec Idrissa Seck : tantôt l'on se dit qu'il n'a pas triché,détourné de l'argent, car autrement l' Etat l'aurait arrêté facilement. Tantôt l'on se demande si tout ça ne ressemble pas à une farçe? A un deal entre les deux hommes qui consisterait à un legs du pouvoir organisé politiquement, pour lui donner une légitimité. D'aucuns situent déjà les retrouvailles dans l'entre deux tours, si le quart bloquant est toujours maintenu... Bref ce sont des spéculations effarantes.
Dans tous les cas, ce qui risque d'être dramatique dans ce DUEL c'est précisément d'avoir à choisir entre ces deux hommes, que je me permets de mettre dans le même sac, si mon hypothèse est valable.
Le Professeur Mamadou Diouf, du Michigan University, disait récemment que ce serait tragique d'avoir à limiter le choix entre Me Wade et Idrissa Seck. Pourtant M. DIouf sait bien qu'il en est ainsi. Car c'est bien cela qui ressort d'une lecture de l'offre politique. Le Parti Socialiste aurait pu changer quelque peu la donne, mais il semble amorphe ces jours-ci. Il ne faut pas compter sur les singletons Bathily, Dansonkho, Savané pour renverser la tendance.
Ma conviction est faite que le choix sera d'autant plus difficile que les deux termes du choix se valent intrinsèquement : bien entendu, je pars du postulat que Me Wade, au nom de politiques politiciennes, aura trahi le pacte qui devait le lier au peuple qui l'a élu en 2000 et qui portait beaucoup d'espoirs sur lui, espoirs qui se sont étiolés au fil des 6ans .... Idrissa Seck serait-il le moindre mal ? Meilleur que Me Wade ? J'en doute fort !!
Devrait -on réélire Me Wade à 83 ans avec le risque d'avoir peut être une instabilité au sommet de l'Etat ? Doit-on lui laisser le temps de terminer ses travaux dont les délais de construction paraissent bien exiger plus que deux mandats de 5 ans ? Doit-on le réélire pour qu'il se donne le temps de trouver enfin un dauphin digne de le remplacer, comme il le proclame ? En réalité un dauphin sûr, qui lui donne la garantie qu'il ne fera pas de mal à sa famille, notamment à Karim Ben Abdallah.
Cette aporie politique est celle métaphysique dans laquelle se trouvait Samba Diallo dans l' Aventure ambiguë. Elle traduit ici notre désarroi, notre dépespoir aussi : je crois qu'il faut vraiment désespérer de la Politique au Sénégal ! Si ce n'est de la politique, au moins de la classe politique actuelle. Ce désenchantement politique ne nous interdit pas d'aller voter, c'est certain, mais il faut dire qu'il est tout de même périlleux et de nature à offusquer nos élans.
Ce message a été posté ailleurs, mais puisqu'il concerne aussi les 'adeptes' de Rewmi et de son Président, il me semble indiqué de recueillir leurs avis, à condition qu'ils s' efforcent, les adeptes bien entendu, à une analyse lucide et objective de la situation socio-politique actuelle pour s'apercevoir des vérités contenues dans cette lecture que nous proposions.